couverture livret 2019

Lectio divina sur le récit de l’Annonciation

Voici quelques lignes qui peuvent vous aider à entrer dans la compréhension de ce grand récit. Je le ferai en quatre étapes en vous proposant à chaque fois quelques pistes pour votre méditation. L’essentiel est que vous entriez personnellement dans ce texte.1

Ces quatre moments sont :

– Un amour qui prend l’initiative (v. 26-28)

– Trouble et réflexion (v. 29-30)

– La lumière d’en Haut (v. 31-35)

– Le signe (v. 36-38)

 

I. Un amour qui prend l’initiative (v. 26-28)

Lectio

Dieu prend l’initiative. Il aime en premier.

Nous ne pouvons que recevoir ce qu’il donne et lui répondre – ou non – dans la liberté qu’il nous offre.

Recevoir sa création si belle et diverse : « homme et femme il les créa »

Recevoir son salut, à travers l’Homme nouveau, né d’une femme.   

« L’ange Gabriel fut envoyé » : un « passif divin », où le sujet est mentionné pour rendre clair que c’est Dieu qui fait le premier pas.

Quand Dieu agit, c’est toujours du concret, en un lieu et en un temps donnés : « le sixième mois », après la visite du même ange Gabriel à Zacharie, le mari d’Élisabeth, cousine de Marie.

Il visite Nazareth, obscure bourgade de Galilée. Dieu choisit la simplicité et la pauvreté et nous déclare « heureux » quand, après lui, nous les choisissons aussi ! (Matth 5,2)

« Sois joyeuse » ou « Réjouis-toi » ! C’est le sens du grec « Caire » (Chairè). L’ange ne dit pas à Marie « Shalom », la salutation hébraïque habituelle, mais l’appelle à la joie, en écho à l’annonce du salut à la fille de Sion chez les prophètes Sophonie et Zacharie : « Réjouis-toi, fille de Sion » ! (Soph 3,14 ; Zach 9,9) Marie personnifie ici cette fille de Sion, le peuple juif à qui la promesse du salut a été donnée.

Quand Dieu agit c’est pour notre plus grande joie.

Marie est « favorisée » ou « remplie de grâce ». Dieu l’a choisie pour une mission tout-à-fait spéciale et unique : devenit le réceptacle du Fils éternel de Dieu.

« Le Seigneur est avec toi » : comme il l’était avec Moïse à qui il a révélé le nom de l’alliance, le tétragramme : « Je serai avec toi » (Exode 3,14).  Comme il l’a été avec David et tous les prophètes. Mais il y a ici plus que Moïse et les prophètes. Dieu devient Emmanuel – « Dieu avec nous » en s’incarnant dans une femme bénie entre toutes.

 

Meditatio

A nous aussi, Dieu dit « Réjouis-toi » quand il vient à notre rencontre. Il nous veut heureux.

Comme à Marie, il veut nous redire son amour.

Tout ce que Marie a vécu, nous pouvons le revivre ! Excepté la conception divine de Jésus !

« Marie précède, l’Église suit », écrivait Amédée de Lausanne, grand évêque de cette cathédrale, dont les « Homélies mariales » ont inspiré le magnifique « Portail peint ».  

Puis-je accueillir ce qu’il veut me dire : « Réjouis-toi, Martin ! Le Seigneur est avec toi » !

Ai-je entendu sa voix ? Quand ai-je vécu une annonciation dans un temps et un lieu concrets ? Quel est mon « sixième mois » et mon « Nazareth » ?

Dans la prière je peux le remercier pour sa visite. Ou lui demander une nouvelle…ou une première visite !

 

II. Trouble et réflexion (v. 29-30)

Lectio

Si Dieu agit en premier, la vocation de l’homme est de lui répondre. Quelle est la réponse de Marie ? Sa première réaction est la surprise. Puis elle réfléchit profondément.

« A ces mots elle fut très troublée ».

Tous les prophètes avant elle ont eu un moment d’hésitation quand Dieu est entré dans leur vie. Pensons à Moïse, à Jérémie, à Jonas… ! Pensons aussi à Zacharie, son cousin, qui a eu la frousse de sa vie quand le même ange Gabriel lui a annoncé que sa femme – stérile – enfanterait.

Mais il n’est pas dit que Marie a eu peur et a douté comme Zacharie.

Le texte nous la montre en train de réfléchir : « Elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation ». A plusieurs reprises l’évangéliste Luc nous montre Marie comme une femme d’intériorité, méditant et priant sur ce qu’elle voit ou entend. (2,19,51)

Je reviendrai sur ce point essentiel : MARIE EST UNE FEMME D’ECOUTE, comme l’indique le petit livret de l’École de la Parole de cette année.

 

Meditatio

Dans notre méditation, nous pouvons nous remettre en mémoire quelle a été notre réaction quand nous avons reçu un appel.

Comment avons-nous cherché à comprendre son sens ? L’avons-nous gardé pour nous ou l’avons-nous partagé avec d’autres ?

Et dans la prière je peux me remettre avec sincérité devant Dieu en lui demandant la grâce de l’intelligence de la foi.

 

III. La lumière d’en Haut (v. 31-35)

Lectio

Suite à la disponibilité de Marie, l’ange lui annonce la grande nouvelle : une lumière d’en Haut qui accomplit la prophétie donnée au prophète Esaïe : « Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils… »

Cette lumière l’éclaire en deux rayons.

Le premier est celui où Gabriel lui dit que son fils sera Fils de David qui « règnera pour toujours sur la famille de Jacob » (le peuple juif) (v. 33)

Le deuxième rayon lui est donné suite à sa demande d’éclaircissement (« comment cela se fera-t-il puisque je n’ai pas de relations conjugales »). L’ange lui dit que l’Esprit saint viendra sur elle.

A tel point que cet enfant ne sera pas seulement « fils de Marie » mais aussi « saint et Fils de Dieu ».

Les mots utilisés ici – « L’Esprit saint te couvrira de son ombre » – évoquent le Tabernacle du désert et le Temple de Jérusalem. Comme la nuée résidait dans le temple, sur l’Arche de l’Alliance, ainsi elle couvre Marie de son ombre. Marie est la nouvelle Arche de l’Alliance.

 

Meditatio

Pour notre méditation, je vous propose deux pistes, à partir de ces deux rayons de la lumière d’en Haut.

  • D’abord, nous pouvons réfléchir à notre relation à cette « famille de Jacob» sur laquelle le Fils de David règne à jamais. Quelle est ma perception du « mystère d’Israël » ? (voir ici ma méditation sur ce thème )
  • Puis, nous pouvons répéter intérieurement ces quelques mots de l’ange : « L’Esprit saint viendra sur toi ». Quel est le sens de cette promesse pour moi, pour toi ?

Seigneur, éclaire-nous sur le mystère du peuple d’où tu es issu, à travers lequel tu as donné la lumière aux nations ! Comme sur Marie, ta mère, verse sur nous ton Esprit !

 

IV. Le signe (v. 36-38)

Lectio

Avant de la quitter, l’ange donne un signe à Marie : sa cousine Élisabeth est aussi enceinte.

Dieu donne des signes pour fortifier notre foi et confirmer la vérité de ses promesses.

Pour Marie ce signe sera très fort : quand elle rencontrera Élisabeth, celle-ci sera remplie de l’Esprit parce que l’enfant en elle a bondi de joie. Mais surtout elle nommera Marie « la mère de mon Seigneur ». (1,43) Qui a révélé à Élisabeth que Marie est enceinte sinon l’Esprit saint ?

Marie a été confirmée dans sa foi par l’accomplissement de ce signe. C’est alors qu’elle laisse exploser sa joie en chantant sa reconnaisance.

Quand Dieu parle, il agit. Sa Parole ne revient pas à lui sans avoir produit un effet.

C’est le sens de l’affirmation de l’ange : « Rien n’est impossible à Dieu ». Littéralement : « Rien n’est impossible pour chaque Parole de Dieu » ! (1,37)

Marie, femme d’intériorité, laisse cette Parole résonner en elle. Elle l’écoute, la médite et la prend au sérieux. Elle se met à l’École de la Parole. Elle est vraiment un modèle de ceux qui, comme nous le faisons maintenant, pratiquons la « Lectio divina ».

Sa réponse le confirme. « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l’as dit » ! (1,38)

 

Meditatio

Pour votre méditation, je vous donne deux pistes :

  • Comment prenons-nous au sérieux la Parole de Dieu ? Comment avons-nous intégré la pratique de la Lectio divina dans notre vie ? Comment féconde-t-elle notre vie spirituelle ?
  • Et nous pouvons aussi réfléchir sur les signes de la bonté de Dieu que nous avons reçus. Et peut-être lui en demander un, en fonction des circonstances présentes de notre vie.

 

Prière d’envoi.  

Quels mots peuvent dire ce mystère ?

Tu as été avec Abraham et Moïse.

Mais avec Marie, il y a plus :

Toi-même, tu deviens « Emmanuel »,

« Dieu avec nous »

qui se mêle à jamais

à notre pâte humaine

pour l’assumer et la transfigurer !

 

Comme Marie, tu nous appelles aussi.

Comme elle et les prophètes avant elle

Nous pouvons avoir un moment d’hésitation.

 

Alors, donne-nous chaque jour de te redire :

« oui » avec confiance

pour que tu naisses et renaisses en nous ;

« oui » avec amour

pour que toute peur soit bannie de nos cœurs ;

« oui » avec espérance

pour que s’ouvre une aventure extraordinaire.

1 Commentaire donné lors de la célébration œcuménique pour les 25 ans de l’École de la Parole en Suisse romande. Cathédrale de Lausanne, 1er septembre 2019. Pour le livret de l’Ecole de la Parole sur « Marie à l’écoute de la vie », voir ici


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