Demeurez dans mon amour

Demeurer dans la Parole et l’Amour

Je ne vous étonnerai pas en disant que tout est si incertain en ce moment. Il semble que tout passe, tout s’écroule. Comment gérer cette situation !

Nous vivons dans des jours, des semaines et des mois qui paraissent interminables.  Beaucoup doivent consentir à des renoncements, plus ou moins grands. Tous nous devons réduire nos engagements et surtout nos relations. (Regardez ici la vidéo)

Et cela est très dur car nous sommes des êtres relationnels, des animaux sociables selon Aristote, ou comme le dit l’Écriture, des personnes créées à l’image de Dieu qui est plénitude de relations !

Qu’est-ce qui reste quand nous perdons notre travail, notre fortune ou notre santé ? Peut-être des êtres chers durant cette piéride ? Où allons-nous chercher la stabilité, l’encouragement, l’espérance.

Dans ces temps, beaucoup redécouvrent Dieu et son amour. La seule réalité qui reste quand tout s’effondre. 

Je crois que ces temps actuels sont un appel puissant à revenir à lui.

Mais comment y revenir ou y venir pour la première fois ?

 

Revenir à la Parole

En revenant à sa Parole vivante et efficace.

Me reviennent à l’esprit ces paroles du prophète Esaïe : « Dieu dit : ma parole qui sort de ma bouche : elle ne revient pas à moi sans effet, sans avoir fait ce que je désire, sans avoir réalisé ce pour quoi je l’ai envoyée » (55,10-11).

A quoi fait écho ce verset de la lettre aux Hébreux : « La parole de Dieu est vivante et efficace, plus tranchante qu’une épée quelconque à deux tranchants ». (4,12)

La Parole ! Il ne reste que celle-ci finalement !

Durant sa semaine de prière qui se termine aujourd’hui, l’Alliance évangélique mondiale appelle à revenir à la Parole de Dieu.

Dans l’excellente brochure sur le thème de la Bible, publiée par le Réseau évangélique suisse pour cette semaine, j’ai lu une intéressante enquête aux USA faite auprès de 250 milles personnes.

Elle a montré que rien n’a plus d’impact sur la croissance spirituelle que la réflexion sur l’Écriture. https://evangelique.ch/sup2021-2/

L’Église qui a lancé cette enquête en a pris de la graine : elle a remodelé ses programmes pour permettre à ses membres de s’approprier les Écritures par eux-mêmes.

Revenir à la Parole ! Pas besoin d’imaginer des programmes compliqués pour tenir bon dans cette tempête !

Martin Luther écrivait : « Que l’homme qui voudrait entendre Dieu parler lise les Saintes Écritures ».

Léon Bloy disait : « Quand je veux connaître les dernières nouvelles, je lis Saint Paul ».

Cela devrait nous faire réfléchir, nous qui sommes submergés par des informations redondantes et anxiogènes.

Est-ce que la méditation de la Bonne Nouvelle dans la Bible a encore une place dans la logorrhée actuelle ?

 

« Demeurez dans mon amour et vous porterez du fruit en abondance »

Ce verset de l’Évangile de Jean, au chapitre 15, est le thème de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens qui commence demain.

Nous sommes donc aujourd’hui au carrefour de ces deux semaines de prière.

Je vois une heureuse convergence dans le choix de leurs thèmes.

La première appelle à « demeurer dans la Parole ».

La seconde à « demeurer dans l’amour du Christ ».

En effet dans cet évangile, Jésus appelle successivement à demeurer en lui ; à demeurer dans la Parole, ou que ses paroles demeurent en nous (v. 7) et enfin à demeurer dans son amour.

Par là-même, il nous fait comprendre que ses Paroles doivent être vécues dans l’amour.

Demeurer dans la parole, c’est demeurer en Christ et demeurer dans l’amour

C’est la Communauté de Grandchamp, au bord du lac de Neuchâtel, qui a choisi le thème de la semaine de prière pour l’unité de cette année. https://www.grandchamp.org/unite2021/

Chaque jour, elle dit ces paroles qui font partie de sa règle :

« Prie et travaille pour qu’il règne ! Que dans ta journée labeur et repos soient vivifiés par la Parole de Dieu » !

Dans ce passage de Jean, Jésus se présente comme la « vraie vigne ». Or la vigne désigne le peuple d’Israël dans la Bible. Jésus est donc est donc le juif accompli qui vit les paroles de la Torah.

Il incarne la vocation d’Israël à demeurer dans la Parole de Dieu et à porter du fruit dans l’amour réciproque.

Or, à travers Jésus, nous sommes des sarments greffés sur la vigne d’Israël. Avec le peuple juif qui continue à être cette vigne aujourd’hui nous sommes appelés à produire des fruits d’amour, de justice et de sainteté.

 

Cohérence

Mais posons-nous la question ! Comment donner envie de lire les Écritures aux gens qui ne les lisent pas ?

Une chose est sûre : s’ils ne lisent pas les Écritures, ils lisent nos vies.

Ils cherchent à voir comment nous nous relions les uns aux autres. Ils s’attendent à ce que nos actions soient en accord avec nos paroles. Elles accordent davantage d’importance à nos actes qu’à nos paroles.

Nos vies témoignent-elles de la mise en pratique du commandement nouveau de Jésus qui appelle à l’amour réciproque ?

C’est bien de cela qu’il s’agit dans cette page de l’évangile de Jean. Pour lui il y a une étroite correspondance : demeurer en Christ signifie demeurer dans la Parole et demeurer dans la Parole signifie demeurer dans l’Amour qui se résume dans le commandement nouveau : « Si vous observez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour… Voici mon commandement : aimez-vous les uns les autres comme je vous aimés » (15,10-11).

 

Se rendre proche

Demeurer dans l’amour signifie se rendre proche de l’autre. Parce que Dieu dans sa grâce nous a rapprochés de lui, nous avons à nous rendre proches des autres.

C’est ce que j’appelle la « logique de l’incarnation » : Dieu en Christ s’est approché de nous, nous avons donc à nous approcher des autres. Comment nous rendons-nous proches des autres ?

L’année dernière, à cette époque j’étais à Jérusalem avec un groupe d’une trentaine de personnes pour marcher sur le chemin d’Emmaüs dans le cadre de l’initiative JC2033, à laquelle je collabore. En effet, chaque année jusqu’en 2033 – les deux mille ans de la résurrection de Jésus – nous invitons à un pèlerinage sur le chemin d’Emmaüs. Voir https://www.jc2033.world/fr/eventsfr/emmaus-2021.html

Nous avons alors visité, entre autres, le nouveau patriarche catholique latin, Pierre-Baptiste Pizzaballa.

Celui-ci a souligné que le dénominateur commun de nos difficultés est l’individualisme. Pour lui, la manière de le surmonter est « de partir de notre relation avec le Christ et non de nos besoins ». Comprendre qu’« en tant qu’Église, nous sommes plutôt appelés à nous demander comment être un don les uns pour les autres ; au lieu de demander ce que l’autre a à faire pour moi, demandons-nous comment être proche l’un de l’autre ».

Se rendre proche l’un de l’autre, c’est faire le premier pas, « devenir le prochain » de l’autre, comme le bon samaritain s’est rendu proche de l’homme blessé.

Notre modèle est Jésus lui-même qui fait le premier pas, comme on le voit sur le chemin d’Emmaüs, où il s’approche des deux disciples complètement désemparés.

Vous connaissez comment se termine la parabole du bon samaritain : « va et fais de même » !

Et vous savez aussi comment se termine le récit d’Emmaüs : les disciples sortent et courent annoncer la grande nouvelle de leur rencontre avec le Ressuscité.

« Demeurez dans mon amour et vous porterez du fruit en abondance » signifie que la Parole conduit à la vie, à sortir pour rencontrer les autres, à faire le premier pas, à accueillir les autres comme un don et à devenir un don pour les autres.

Dieu nous a en effet créés pour que nous soyons un don les uns pour les autres.

 

Retournement

J’aimerais terminer par une expérience qui a marqué ma vie à jamais et qui m’a fait réaliser la force de la Parole de Dieu et l’importance de la vivre tout de suite.

Vers l’âge de 18 ans, un intense questionnement existentiel surgit en moi. A la grande surprise de ma famille et de mes amis, j’ai décidé de commencer des études de théologie à Lausanne.

Je pensais que la théologie me permettrait de trouver des réponses à mes nombreuses questions sur le sens de la vie. Mais j’étais quasi athée. Pour vous donner une idée de ma recherche spirituelle à cette époque, je suis entré, un jour, dans une église et j’ai écrit sur la chaire : « Dieu n’existe pas » !

A la fin de la première année, je décidai d’arrêter ces études qui avaient comme objet cette personne qui n’existait pas. Je me suis alors inscrit en facultés de lettres à Genève. Mais un peu plus tard, par un concours de circonstances, j’ai été invité à participer à la retraite inaugurale de la faculté de théologie d’Aix en Provence.

J’ai fait le voyage, sans doute davantage attiré par le soleil de Provence que par celui de la vérité.

Mais j’étais touché par l’ambiance fraternelle. Le dernier jour une parole de l’Évangile a transpercé mon cœur, dite par un des professeurs.

Elle mettait le doigt sur des aspects de mon comportement qui a blessé plusieurs personnes. Le soir, je me suis agenouillé dans ma petite chambre. Un seul mot sort alors de ma bouche « Pardon » !

C’était la première fois que je priais du fond du cœur. Le lendemain je quittais Aix pour Lausanne, avec l’intention de ne plus y revenir.

Mais, dans le train, à la sortie d’un tunnel (tout un symbole), mon cœur s’est enflammé. J’ai été saisi par la réalité de l’amour de Dieu. En un instant, ce Dieu qui n’existait pas est devenu réel.

J’ouvre alors ma Bible et lit ces paroles : « Dieu est amour, qui demeure dans l’amour demeure en Dieu et Dieu demeure en lui » (1 Jean 4,16). C’était comme du feu sur du feu.

Cette expérience de l’amour de Dieu est devenue l’axe spirituel de ma vie. C’était comme un chemin de Damas : il y a eu un avant et un après. Elle reste très présente à mon esprit.

De retour à la maison je me rendis chez les personnes que j’avais blessées pour leur dire le même mot que j’avais dit devant Dieu dans ma chambre provençale : « pardon ».

Dans cette expérience, j’avais compris que la Parole de Dieu devait être vécue. Demeurer dans la Parole de Dieu signifie demeurer dans le Christ qui est amour. Se laisser rejoindre par la Parole signifie ouvrir son cœur et ensuite se rendre proche de chacun.

Se rendre proche de l’autre est aussi au cœur de toute démarche d’unité entre Églises. Elle commence par des relations les uns avec les autres.

Je vous souhaite à tous de passer un beau dimanche, en demeurant dans la Parole et dans l’amour. Que le Christ vous donne de porter ainsi beaucoup de fruits !

Voici trois questions qui peuvent stimuler votre réflexion :

– Quels moyens est-ce que je me donne pour « demeurer dans la Parole » durant ces temps troublés ?

– Comment la Parole de Dieu me stimule-t-elle à me rendre proche des autres ? Vous pouvez partager une expérience entre vous.

– Durant cette semaine de prière, quel signe d’unité puis-je donner ?

 

 Prière

Et je vous propose de conclure avec cette prière :

Seigneur, en ces temps où les châteaux de cartes s’effondrent,

tu nous aimes et tu es proche de chacun.

Fais-nous comprendre l’urgence de revenir à toi.

Le ciel et la terre passeront, mais tes paroles demeurent à jamais.

Alors donne-nous de demeurer dans ta Parole.

Par elle tu nous appelles à demeurer dans l’amour.

Ne nous laisse pas nous replier sur nous-mêmes,

mais réveille-nous pour que nous sortions à ta rencontre.

Stimule notre imagination et notre créativité

pour que nous soyons proches les uns des autres !

 

Église évangélique de Villard, Lausanne, le 17 janvier 2021


Publié

dans

par

Étiquettes :