Semeur Van Gogh

Semailles et moissons

Le livre de Quohélet (ou l’Ecclésiaste) nous propose une sagesse surprenante pour les temps que nous vivons. Il nous invite à prendre des risques tout en restant prudents, à ne pas rester oisif tout en s’abandonnant à la providence divine. Voici la deuxième méditation sur le thème des semences que je propose à mon groupe de jeûneurs en ligne.

 

Prendre des risques

« Jette ton pain sur l’eau, car avec le temps tu le retrouveras ; donne une part à sept, et même à huit, car tu ne sais pas quel malheur peut arriver sur la terre » (Quoh. 11,1)

De manière imagée il appelle d’abord à l’engagement en prenant des risques, et à ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. La traduction en français courant explique cette image ainsi :

« Engage-toi dans une affaire, même en courant des risques, un jour tu peux y retrouver ton compte. Bien plus, investis dans plusieurs affaires, car tu ne sais jamais quel malheur peut arriver sur la terre ».

Investir dans plusieurs affaires, c’est le BA-BA de l’investissement de ses efforts et de ses biens !

Qui aurait pu prévoir le malheur arrivé avec le Coronavirus ? Combien d’investissements seront perdus ? En particulier pour les boursicoteurs !

 

Rester modeste

Mais en même temps qu’il nous invite à prendre des risques, Quohelet appelle à la modestie, car nous ne pouvons pas tout maîtriser.

« Celui qui observe trop le vent ne sèmera pas, celui qui regarde trop les nuages ne moissonnera pas. Tu ne sais pas où va le vent, ni comment se forment les os dans le ventre d’une femme enceinte » (v. 3-4)

Le paysan fait confiance et s’abandonne à la Providence pour les semailles et les récoltes. Il ne s’appuie pas seulement sur la météo. Il se fie en Dieu qui est le maître du beau ou du mauvais temps.

Celui qui a confiance en Dieu ne s’inquiète de rien. Il est libéré de ses soucis par la confiance qu’il met en lui. Le Seigneur le redira de manière inoubliable en reprenant l’image des semailles et de la moisson : « Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent ; ils n’amassent rien dans les greniers et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux » (Mat 6,26)

Il est juste et bon de faire des projets, mais voici ce que nous devrions dire : « Si le Seigneur le veut, nous vivrons et nous ferons ceci ou cela. » (Jaques 4,15)

 

Dieu reste incompréhensible

Cette sagesse « terrienne » conduit Quohelet à dire une profonde vérité sur Dieu : « Tu peux encore moins comprendre comment Dieu agit, lui qui fait tout ». (v.4)

Il faut résister aux explications simples, unilatérales. La réalité que Dieu a créée est complexe. La situation de pandémie actuelle nous dépasse tous. Qui pourrait dire quand elle prendra fin ?

Elle est un appel à nous confier en Dieu. « Lui qui fait tout » saura y mettre un terme, de manière toute aussi incompréhensible qu’elle a commencé !

Elle est aussi un appel à l’aimer plus que tout, à l’image de Pierre qui lui dit : « Seigneur, tu sais toutes choses ; tu sais que je t’aime ! » (Jean 21,17)

 

Travailler sans cesse

« Dès le matin, sème ton grain et jusqu’au soir n’arrête pas de travailler » ! (v. 6)

Comment mettons-nous à bon profit ce temps que nous vivons actuellement ? Ce temps où nous travaillons autrement, ou bien ne travaillons plus, suite au chômage.

Peut-être est-ce un temps où nous pouvons travailler sur nos relations les uns avec les autres ? Peut-être est-ce un temps de grâce qui nous est donné pour mettre l’accent non sur nos projets, mais sur nos relations ?

Et puis, peut-être pouvons-nous revenir à la terre ? Mars, c’est le temps des semis. Pourquoi ne pas mettre quelques semences dans du terreau pour les planter au mois de mai en terre ou dans des pots sur votre balcon ?

Nous espérons tous qu’en mai cette épidémie aura pris fin.

 

Appel à la générosité

Le deuxième texte que je vous propose est tiré de la deuxième lettre de Paul aux Corinthiens. Avec l’image des semailles, il appelle à la générosité :

« Rappelez-vous ceci : celui qui sème avec avarice récoltera petitement ; celui qui sème avec générosité récoltera abondamment. Que chacun donne donc comme il l’a décidé » (2 Cor 9,6).

Il rappelle que la croissance est la logique de la vie. Dieu nous donne abondamment pour que nous puissions partager à notre tour.

« Dieu, qui fournit la semence au semeur et le pain pour nourriture, vous fournira en abondance la semence dont vous avez besoin et il la fera croître, pour que votre bonté produise beaucoup de fruits ». (v. 10)

Une croissance qui n’est pas orientée vers le partage détruit les relations. Mais si nous reconnaissons que Dieu est celui qui nous donne tout (v. 8), alors nous pouvons à notre tour donner et même « nous montrer sans cesse généreux » (v. 11).

Dieu a donné ce qu’il a de plus précieux, son Fils unique (Jean 3,16) afin qu’à notre tour nous partagions. Et dans ce partage nous trouvons la joie : « il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » ! (Actes 20,35).

Je conclue en vous proposant ces questions :

  • « Se montrer sans cesse généreux », qu’est-ce que cela signifie pour moi dans les temps si particuliers que nous vivons ?
  • A quelle générosité Dieu m’appelle-t-il ?
  • Ou peut-être est-ce un temps où il m’invite simplement à recevoir ?
  • Que veut-il me donner ?

 

Prières

I.

Seigneur, tu es le cep et nous sommes les sarments.

Tu désires que nous portions du fruit en abondance.

Telle est la loi de la vie, de la nature et de l’Église.

 

Nous te prions donc pour ton peuple.

Bénis-le, rends-le fécond et multiplie-le !

Qu’à travers lui le Royaume de Dieu s’élargisse

et que beaucoup viennent à te connaître et te servir !

 

Oui, que cette vigne, ta vigne, étende ses racines et prospère,

pour la joie de ses fidèles, le rayonnement de ta Parole et le salut du monde !

Mais, Seigneur, tu as aussi donné cette autre loi de la vie :

« tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il porte encore plus de fruit ».

 

Oui, nous reconnaissons que nous avons besoin d’être émondés.

Pas seulement au temps des effeuilles comme pour une vigne,

mais chaque jour que tu nous donnes,

et particulièrement en ce temps de pandémie.

 

Alors nous venons à toi et te demandons :

Coupe tout ce qui ne produit pas de fruit ou du mauvais fruit !

Ôte les branches folles et neutralise les parasites !

Protège notre vigne des ennemis…surtout de celui de nos âmes !

Nous t’ouvrons nos cœurs :

Ôte de nous tout ce qui nous sépare de toi,

et donne-nous tout ce qui nous conduit vers toi !

 

II.

Seigneur, cette sainte période du Carême passe rapidement. J’y suis entré avec crainte, mais aussi avec de grandes attentes. J’espérais une grande percée, une puissante conversion, un véritable changement de cœur ; je voulais que Pâques soit un jour si plein de lumière qu’aucune trace d’obscurité ne resterait dans mon âme.

Mais je sais que tu ne viens pas vers ton peuple avec le tonnerre et la foudre. Même saint Paul et saint François ont traversé beaucoup de ténèbres avant de pouvoir voir ta lumière. Laisse-moi te remercier pour ta douceur. Je sais que tu es à l’oeuvre. Je sais que tu ne me laisseras pas tranquille. Je sais que tu me mets en route vers Pâques – mais d’une manière qui convient à ma propre histoire et à mon propre tempérament.

Je prie pour que ces trois dernières semaines, au cours desquelles tu m’invites à entrer plus pleinement dans le mystère de ta passion, m’apportent un plus grand désir de te suivre sur le chemin que tu traces pour moi et d’accepter la croix que tu me donnes. Laisse-moi mourir au désir de choisir ma propre voie et de sélectionner mon propre désir. Tu ne veux pas faire de moi un héros, mais un serviteur qui t’aime.

Sois avec moi demain et dans les jours à venir, et donne-moi de faire l’expérience de ta douce présence. Amen. (Henri Nouwen)

 

II.

Quels que soient les événements de la journée, 

heureux ou malheureux,

donne-moi, Seigneur, le soir venu,

de me replacer avec sincérité devant toi! 

 

Accorde-moi la grâce des larmes 

pour tout ce que je n’ai pas vécu dans ton Esprit !

Que mon coeur te rende grâce 

pour tous les bienfaits reçus! 

Et que ma prière s’élève vers toi

pour les proches et les lointains !

 

Donne aussi ta présence à tous ceux 

qui franchissent le seuil vers ta vie

et console ceux qui pleurent un être cher! 

 

Reste avec nous durant cette nuit!

Qu’avec toi nous nous endormions en paix! 

Qu’avec toi nous veillions dans l’insomnie! 

Qu’avec toi nous nous réveillions,

comme un nouveau matin de Pâques! 

 

« Les pleurs sont encore là le soir, 

mais au matin éclate la joie » (Psaume 30,6)

 

Lire ici les autres méditations de cette retraite


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