Signature Wittenbert

A Wittenberg, les Eglises donnent un signe d’unité.

Quel meilleur endroit pour donner un signe d’unité que l’Eglise paroissiale de Wittenberg, là où Martin Luther a prêché la justification par la foi durant la plus grande partie de son activité ? Dans le chœur de cette « Eglise-mère » de la Réformation, le tableau central du triptyque peint par Lukas Cranach représente le Christ à table, au milieu de ses disciples. C’est lui qui nous invite. Devant lui, le 5 juillet dernier, les Eglises catholique, luthérienne, méthodiste et réformée ont répondu à son invitation !

 « Tout l’effort de Martin Luther a été en effet de redécouvrir le Christ. Le mettre au centre a été le cœur de la Réforme », affirme H. Bedford-Strohm, le président de l’EKD, l’Eglise protestante en Allemagne. Il ajoute : « Aujourd’hui nous ne pouvons que l’annoncer ensemble, en reconnaissant les blessures que nous nous sommes faits. Dans un monde divisé où l’injustice semble régner, nous donnons un signe d’unité et proclamons l’amour de Jésus-Christ avec la conviction que cet amour aura un jour le dernier mot ». 

En écho à ces paroles de bienvenue, Jerry Pillay, le président de la Communion mondiale des Eglises réformées (CMER) – qui tenait ces jours son assemblée générale – se réjouit : « Voici le jour que le Seigneur a fait. Un jour historique ! Nous avançons vers l’unité, 500 ans après la Réforme où l’Eglise s’est divisée. Trop longtemps nous avons mis l’accent sur ce qui nous sépare. Nous célébrons aujourd’hui ce qui nous unit. Jésus a prié pour l’unité et il sourit aujourd’hui ! »

Montée sur la chaire de l’Eglise pour la prédication, Najla Kassab, la présidente de la CMER nouvellement élue, déclare avec les mots de Luther à Worms : « Me voici debout devant vous, je ne peux autrement ( Hier stehe ich und kann nicht anders ) ».

Avec l’image de la maison, elle affirme : « C’est Dieu qui a le plan final de la maison. C’est pourquoi nous continuons à réformer l’Eglise, pour qu’elle soit de plus en plus comme Dieu la veut…Pour cela nous avons besoin les uns des autres. C’est ce qui nous rassemble aujourd’hui. Chacun apporte sa pierre pour construire ».

 

La justification par la foi nous conduit à marcher dans la justice

Mais quelle est la pierre qui a été apportée ce jour à l’édifice ? Alors que luthériens et catholiques avaient signé une Déclaration commune sur la doctrine de la justification en 1999 déjà et que les méthodistes les avaient rejoint en 2004, il a fallu attendre ce jour pour que les réformés se réunissent à eux. La CMER proclame ainsi son accord avec l’enseignement de cette Déclaration commune. Voici ce qui a été affirmé d’un commun accord :

« La justification signifie que le Christ lui-même est notre justice, car nous participons à cette justice par l’Esprit saint et selon la volonté du Père.

Nous confessons ensemble: c’est seulement par la grâce au moyen de la foi en l’action salvatrice du Christ et non sur la base de notre mérite que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons l’Esprit saint qui renouvelle nos cœurs, nous habite et nous appelle à accomplir de bonnes œuvres ».

La Déclaration commune affirme aussi que la justification est l’œuvre du Dieu trinitaire : l’incarnation, la mort et la résurrection du Christ en sont le fondement et le présupposé.

Alors que les méthodistes soulignent le lien profond entre justification et sanctification, les réformés insistent sur le lien entre justification et justice. Celui qui est justifié par la foi est appelé à agir de manière juste et à lutter pour la justice dans notre monde. La justice est d’ailleurs un des grands thèmes de la CMER, que l’Assemblée a traité à temps et contre temps !

 

Un jalon vers l’unité.

Après la signature du document, suivie par un tonnerre d’applaudissements d’une assemblée très colorée (composée principalement par les 400 délégués de l’assemblée de la CMER, venus de plus de 100 pays), le secrétaire du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens, Mgr Brian Farrell déclare : « Dans ce lieu nous comprenons aujourd’hui qu’une nouvelle voie est ouverte. Nous découvrons combien nous avons de choses en commun. Cet accord permettra un témoignage plus profond au Christ ».

Puis il lit la lettre du pape François qui se réjouit de cet « événement oecuménique hautement significatif, qui nous permettra de mieux marcher ensemble vers l’unité comme frères et soeurs en Christ. Qu’il soit un jalon, grâce au pouvoir salvateur de la croix du Christ, source de notre réconciliation ! »

Pour témoigner d’une recherche plus large de l’unité chrétienne, d’autres représentants d’Eglises ont été invités. Ainsi, lecture est faite du message du patriarche Bartholomée, qui prie pour que « les blessures de la division soient guéries pour le bien de toute l’Eglise et son unité ». 

Le pasteur Wesley Granberg salue l’assemblée au nom du Forum chrétien mondial qui a élargi l’espace œcuménique aux Eglises évangéliques et pentecôtistes. Touchant a aussi été le message de la Conférence mennonite mondiale, qui représente les descendants de ceux qui lisaient la même Bible que Luther et Zwingli, mais qui ont été persécutés ! Cependant suite à une mémorable célébration de pardon et de réconciliation, à Zurich en 2004, de nouvelles voies sont aujourd’hui tracées : « C’est dans la pratique quotidienne de nos Eglises que l’unité dans la diversité est à vivre. Elle n’est possible que dans un amour sacrificiel vécu à la suite du Christ. »

Concluons en revenant devant le tableau du chœur, avec les mots du pasteur Bloch, de la paroisse de Wittenberg : « C’est vraiment un jour particulier pour l’histoire de cette église. Il est heureux que dans ce lieu, devant l’autel de la Réformation peint par Cranach, des divisions de l’Eglise guérissent » !

Martin Hoegger, Lausanne.

Photo : de gauche à droite: pasteur Jerry Pillay, président de la Communion mondiale des Eglises réformées; Mgr Brian Farrell, secrétaire du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens; pasteur  Jong Chun Park, président du Conseil méthodiste mondial; pasteur Martin Junge, secrétaire de la Fédération luthérienne mondiale.  Assis: Chris Fergusson, secrétaire de la Communion mondiale des Eglises réformées.

A Wittenberg, les Eglises donnent un signe d’unité.


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