Les sources du dialogue interreligieux dans le mouvement des Focolari

Castelgandolfo, 30 mai 2024. Pour comprendre la place du dialogue interreligieux chez les Focolari, il faut revenir aux sources de ce mouvement né durant la seconde guerre mondiale. Le récent congrès interreligieux, vécu sur les hauteurs de Rome, a commencé par un rappel de « l’étincelle inspiratrice ».

Ce mouvement est né pour vivre la page de l’Évangile où Jésus prie pour l’unité (Jean 17). C’était en 1944, durant la guerre. Tout est détruit. La leçon que Dieu donne est claire : tout est vanité et tout passe. Seul Dieu est l’idéal qui ne passe pas. C’est lui qu’elle et ses premières compagnes choisissent comme « Idéal ».

Trouver de nouvelles voies par le dialogue

Margaret Karram, la présidente actuelle des Focolari dit sa reconnaissance à Chiara Lubich, la fondatrice de ce mouvement aux vastes horizons : « Elle nous a appris comment dialoguer et entrer en relation avec l’autre dans le plus grand respect, avec passion et détermination. A chaque rencontre, elle est revenue renforcée dans sa propre foi et édifiée par celle des autres ».

Arabe chrétienne, citoyenne d’Israël, M. Karram a elle-même a vécu intensément cette expérience. Elle est convaincue qu’il est possible de trouver de nouvelles voies par le dialogue. C’est même un devoir urgent auquel Dieu nous appelle. « Nous sommes ici ensemble pour vivre une famille humaine unique, dans sa grande diversité. Que ce congrès nous donne de partager nos expériences et approfondir notre amitié » !

A la source d’un charisme

Comment mettre en pratique ce grand idéal de vie ? Pour C. Lubich et ses premières compagnes, la réponse est simple ; elle l’explique dans une vidéo :  il faut faire la volonté de Dieu. C’est ce qui compte ; l’Évangile le dit. De plus, une lumière le leur fait comprendre, celle d’un « charisme » qui les appelle non seulement à mettre Dieu en premier dans leur vie mais aussi à aimer leur prochain, quel qu’il soit.

Elles découvrent alors que Jésus, parce qu’il est ressuscité, réalise ses promesses : « Donnez et il vous sera donné », « Demandez et vous recevrez ». Après quelques mois, des centaines de personnes voulaient partager leur idéal. Elles comprennent alors que les paroles de l’Évangile sont vraies et universelles. 

Puis, dans toute l’Italie, naissent des communautés semblables à celle de Trente. « L’Évangile nous comble d’amour, mais il exige tout de nous. Il nous fait accueillir Jésus dans la souffrance où il faut aimer Jésus crucifié », répète constamment C. Lubich.

Naît alors un mouvement qui franchit les frontières de tous les continents, se diffuse parmi les fidèles d’autres confessions chrétiennes, puis d’autres religions.

La règle d’or, à la base du désir de fraternité

Dans une autre vidéo de 2002, Chiara Lubich explique qu’elle s’est toujours bien sentie avec les membres d’autres religions : « Nous avons tant de choses en commun, et la différence m’attire. Je sens un grand désir de fraternité quand je rencontre des membres d’autres religions », dit-elle.

Elle insiste sur l’importance de la « Règle d’or » – « Fais à l’autre ce que tu voudrais qu’il te fasse » – qui est commune à toutes les religions. Cette norme que l’Esprit saint a répandue dans les cœurs est un condensé de toutes les lois bibliques. Celle-ci appelle à l’estime réciproque et constitue une base pour commencer la fraternité universelle. Cependant, pour celui qui ne sait pas ce que signifie aimer, il est impossible de construire la fraternité. « Aimer signifie mourir à son égo, sortir de soi-même et écouter l’autre pour le servir. C’est ainsi que commence le dialogue », insiste-t-elle.

Dans une vidéo de 1998, C. Lubich explique encore qu’un « charisme » est un don de Dieu pour réaliser quelque chose de particulier. Il s’est manifesté à elle comme une grande lumière et lui a donné de comprendre l’Évangile de manière nouvelle, avec un élan pour le vivre. Cette spiritualité, centrée sur l’amour envers Dieu et du prochain, a des traits particuliers qu’on retrouve dans d’autres religions.

Un « art d’aimer »

A Caux, dans les hauteurs de Montreux en Suisse, C. Lubich avait été invitée le 29 juillet 2003 à présenter son « art d’aimer ». Pour les chrétiens, cet art a plusieurs qualités. Il est d’abord participation à l’amour de Dieu. Durant la guerre, elle a compris que Dieu seul ne passe pas, alors que tout s’écroulait. Dieu est Père et nous avons à lui répondre comme des fils et des filles, en faisant sa volonté. Et la première volonté d’un père est que ses enfants s’aiment les uns les autres, sans discriminations.

Puis « se faire un » avec autrui, en se chargeant de ses souffrances et joies, en pénétrant dans l’autre, en « vivant l’autre », en étant vide de soi et dans une attitude d’apprenant. « Se faire un : ces trois mots contiennent le secret du dialogue. Cela exige que l’on chasse de notre cœur tout ce qui nous empêche de nous identifier aux autres. Il faut être « pauvre en esprit ». Cela dispose notre interlocuteur à nous écouter », dit C. Lubich

Une autre exigence est de prendre l’initiative d’aimer. C’est un risque, mais Dieu nous aime ainsi. Nous avons été créés comme un don les uns pour les autres. Jésus nous en a donné l’exemple. Lui qui a donné sa vie pour les pécheurs.

La tâche est immense si nous sommes isolés, mais à plusieurs l’impossible devient possible. Et, la présence de Dieu au milieu de nous, fruit de notre amour réciproque, dynamise tout, comme le promet Jésus quand il dit que là où deux ou trois sont réunis en son nom, il demeure au milieu d’eux (Évangile de Mathieu 18,21).

Enfin, il faut sans cesse se rappeler que l’on ne réalise rien de bon, sans assumer la souffrance, en un mot la croix. Ceci n’est pas une théorie, mais une expérience vécue depuis de longues années avec des personnes d’horizons très divers.

Autres articles sur ce congrès : https://www.hoegger.org/article/une-seule-famille-humaine/

Image : Chiara Lubich avec le mouvement juif B’nai B’rith.


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