Mon parcours d’unité

Voici mon expérience que j’ai donnée dans le cadre de la rencontre de « Charis », le renouveau charismatique catholique, le 2 novembre 2023, à Rome.

Je suis né dans une famille interconfessionnelle : mon père était un protestant réformé de Suisse alémanique, tandis que ma mère était une catholique du Tessin, en Suisse italienne. Mes premiers souvenirs de l’Église sont ceux de la messe catholique à laquelle ma mère m’emmenait régulièrement. Cependant, j’avais été baptisé dans l’Église réformée, dans laquelle j’ai reçu toute mon éducation religieuse jusqu’à ma confirmation à l’âge de 16 ans.

MON PARCOURS A COMMENCÉ DANS LA DOULEUR DE LA DIVISION

Je pense qu’une vocation pour l’unité est née à l’âge de 14 ans, lorsque ma grand-mère catholique est décédée. Lors de la messe d’enterrement, le prêtre catholique a refusé de donner la communion à ma mère catholique sous prétexte que son mari était protestant. C’était en 1979.  Par la suite, ma mère n’a pas reçu l’Eucharistie dans son Église pendant des années, par choix personnel. 

Ce fut une grande souffrance et cet événement m’a éloigné de l’Église et des chrétiens. Pourtant, sans avoir ressenti cette douleur de la division, je pense que n’aurais pas œuvré pour l’unité des chrétiens. En fait, l’une de mes expériences œcuméniques les plus fortes a été la messe d’enterrement de ma mère. La première personne à qui le prêtre a donné l’eucharistie a été mon père. Cela l’a beaucoup touché et l’a rapproché de l’Église.

Je suis devenu croyant à l’âge de 20 ans, à la suite d’un « chemin de Damas » personnel. A cette époque je vivais en conflit avec beaucoup de personnes et en avais blessé plusieurs. J’étais devenu athée, alors même que j’avais commencé des études de théologie. Mais je continuais à chercher Dieu.

Un jour, lors d’une conférence, une Parole de l’Évangile de Jésus m’a transpercé le cœur. Le soir, je me suis mis à genoux et une seule parole est sortie de ma bouche : « pardon ». C’était la première fois que je priais du fond du cœur. Le lendemain j’ai fait une profonde expérience de l’Esprit saint : en une fraction de seconde il a enflammé mon cœur et m’a persuadé que Dieu existe et qu’il est amour. Rentré chez moi, j’ai redit ce petit mot « pardon » aux personnes que j’avais offensées.

Ce jour-là j’ai compris qu’il ne peut y avoir d’unité sans union avec Dieu et sans pardon. Dès lors, c’est à genoux que j’avance sur le chemin de l’unité chrétienne !

MON MINISTÈRE DE PASTEUR

Après mes études, j’ai été pasteur dans différentes paroisses de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud, ce qui m’a permis de vivre un œcuménisme de terrain très fort. Chacun des 26 cantons qui composent l’État fédéral suisse a ses propres caractéristiques œcuméniques. Dans le mien, il y a un bon mélange entre l’Église catholique et l’Église réformée, qui sont sur un pied d’égalité, enrichies par d’autres Églises issues de la Réforme, ainsi que par l’Église orthodoxe et les Églises orientales. Nous avons également diverses Églises et mouvements évangéliques. Vous pouvez imaginer qu’ils m’ont permis de vivre une expérience d’unité très forte !

Pendant cinq ans, j’ai été directeur de la Société biblique suisse. Dans ce contexte, j’ai vécu de belles rencontres œcuméniques, tant au niveau national qu’international, notamment grâce à deux projets importants auquel j’ai eu l’occasion de collaborer. Le premier est la traduction de la Bible en français fondamental. Une belle collaboration entre catholiques et protestants !

Le deuxième est l’École de la Parole qui a proposé la Lectio divina à des jeunes en mettant dans le coup des responsables de jeunesse des Églises catholique, protestantes et des communautés évangéliques et pentecôtistes.

A travers ces projets, je me suis rendu compte que la première unité est à vivre autour de la Parole de Dieu !

Mon expérience pastorale a également été enrichie par l’aumônerie d’une communauté de sœurs de l’Église réformée près de Lausanne, où j’ai pu vivre un « œcuménisme spirituel ».

TRAVAIL OECUMÉNIQUE POUR MON ÉGLISE

En 1994, je suis devenu membre de la commission œcuménique de mon Église. Mon mandat était d’abord de rassembler les Églises de migrants, puis de créer des liens avec et entre les autres Églises du canton. A l’occasion de l’entrée dans le troisième millénaire, nous avons décidé de réunir toutes les Églises du canton de Vaud pour une grande célébration, qui s’est déroulée pendant la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens.

Cette célébration a abouti à la création de la Communauté des Églises Chrétiennes du canton de Vaud dont j’ai été le Président puis le Secrétaire exécutif pendant plus de 10 ans. Les célébrations à la Cathédrale de Lausanne (protestante) se sont poursuivies et sont devenues mensuelles, organisées à tour de rôle par l’une des Églises ou par des mouvements.

Environ 150 célébrations ont eu lieu dans cette cathédrale, qui est maintenant ouverte à toutes les Églises. Découvrir comment les Églises prient et écoutent la Parole de Dieu est un formidable apprentissage oecuménique : « Un échange de dons » qui nous enrichit tous. 

EN ROUTE, J’AI DÉCOUVERT LES FOCOLARI

J’ai découvert le mouvement des Focolari en 1994, lors d’une réunion du Conseil oecuménique des Églises en Roumanie. Ce qui m’a attiré dans ce mouvement, c’est que l’unité des chrétiens est placée dans l’horizon de la spiritualité et de la prière. La pratique de la « Parole de Vie », qui consiste à méditer une Parole biblique, à la vivre pendant un mois et à partager la manière dont on l’a vécue, m’a tout de suite interpellée.  

J’ai également découvert que Marie occupe une place particulière dans le plan de Dieu, notamment en raison de sa relation avec la Parole. Non seulement elle a dit « oui » à la Parole qui lui était annoncée, mais elle a aussi vécu de très près la Parole incarnée qu’est le Christ.

MON PARCOURS CONTINUE

J’ai pris ma retraite en mai 2020… mais je ne suis pas en retrait ! Je continue à travailler pour l’unité, car pour moi, l’appel du Christ à l’unité est une vocation et non un travail ! 

Je suis actuellement engagé sur différents fronts : l’enseignement de l’œcuménisme à la Haute école de théologie de Suisse romande ( » HET-PRO « ) qui est un défi ;

Je collabore avec le comité suisse du réseau  » Ensemble pour l’Europe  » qui rassemble plusieurs mouvements de diverses confessions en vue d’un témoignage commun à Jésus-Christ en Suisse et en Europe.

Je participe au comité du « Forum chrétien de Suisse romande (dans l’esprit du  » Forum chrétien mondial « ) ; et, surtout, à  » JC2033 « , une initiative qui invite les Églises à se préparer ensemble à célébrer les 2000 ans de la résurrection du Christ. Les préparatifs comprennent – chaque année jusqu’en 2033 – un pèlerinage œcuménique, en Terre sainte, sur le chemin d’Emmaüs… le chemin de la résurrection par excellence.

En Terre sainte, j’ai aussi participé avec mon épouse Chantal à plusieurs « Montées de Jérusalem », un mouvement né du Renouveau charismatique dans les années 1980. Grâce à elles, j’ai pu rencontrer des chrétiens des Églises traditionnelles de Jérusalem, celles qui sont plus récentes, ainsi que des juifs messianiques. J’ai réalisé à quel point une communion possible, mais pas facile, entre juifs croyants en la messianité de Jésus, et chrétiens des Églises est un magnifique témoignage d’unité.

*****

Au fur et à mesure que mon voyage se poursuit, j’ai le sentiment que pour avancer sur le chemin de l’unité, nous devons toujours avoir le courage de revenir à la prière du Christ pour ses disciples avant sa Passion :  » Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi, afin qu’eux aussi soient en nous, pour que le monde croie que tu m’as envoyé  » (Jn 17,21).

Nous ne pouvons pas dissocier cette prière de la Croix. Si notre regard n’est pas fixé sur le Crucifié, nous ne pouvons progresser ni sur notre chemin spirituel, ni sur notre chemin d’unité. Mon expérience est que si nous regardons le Crucifié, en vivant l’esprit des béatitudes qu’il a lui-même pleinement incarné, c’est-à-dire en aimant envers et contre tout, comme il a aimé, il manifestera la puissance de sa résurrection. Et l’Esprit Saint nous fera avancer sur des chemins d’unité que nous n’aurions jamais pu imaginer !


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