Emmaüs, la blessure de la relation.

Chant : Reste avec nous, Seigneur, le jour décline

Mélodie W-H. Monk 1847, paroles Chaponnière, traduites de l’anglais 1881

1

Reste avec nous, Seigneur : le jour décline,
La nuit s’approche et nous menace tous ;
Nous implorons ta présence divine :
Reste avec nous, Seigneur, reste avec nous !
2

En toi nos coeurs ont salué leur Maître ;
En toi l’Église a trouvé son Époux ;
Sous ton regard l’âme se sent renaître :
Reste avec nous, Seigneur, reste avec nous !
3

Les vains bonheurs de ce monde infidèle
N’enfantent rien que regrets et dégoûts ;
Nous avons soif d’une joie éternelle :
Reste avec nous, Seigneur, reste avec nous !

4

Sous ton regard, la joie est sainte et bonne ;

Près de ton cœur, les pleurs mêmes sont doux.

Soit que ta main nous frappe ou nous couronne,

Reste avec nous, Seigneur, reste avec nous !

5

Et quand, au bout de ce pèlerinage,

Nous partirons pour le grand rendez-vous,

Pour nous guider dans ce dernier passage,

Reste avec nous, Seigneur, reste avec nous !

.

Luc 24,36-43

Ils parlaient encore, quand Jésus lui-même se présenta au milieu d’eux et leur dit : « La paix soit avec vous ! »

Ils furent saisis de crainte, et même de terreur, car ils croyaient voir un fantôme.

Mais Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous troublés ? Pourquoi avez-vous ces doutes dans vos cœurs ?

Regardez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! Touchez-moi et voyez, car un esprit n’a ni chair ni os, contrairement à moi, comme vous le constatez. »

Il dit ces mots et leur montra ses mains et ses pieds. Comme ils n’arrivaient pas encore à croire, tellement ils étaient remplis de joie et d’étonnement, il leur demanda : « Avez-vous ici quelque chose à manger? »

Ils lui donnèrent un morceau de poisson grillé.

Il le prit et le mangea devant eux.

.

Jacob, dans sa lutte avec l’ange, reçoit une blessure à la hanche qui le fera boiter. A la fin du combat, l’ange lui donne aussi une bénédiction. (Cf. Genèse 32) Blessure et bénédiction : dans toute rencontre, il y a à la fois la promesse d’une bénédiction, mais aussi le risque d’une blessure. Il peut arriver que nous refusions la relation, par peur d’être blessé. Mais alors, nous nous isolons et nous mourrons de solitude ou de sécheresse du cœur.

Durant son ministère terrestre, Jésus n’a pas craint d’entrer en relation. Il l’a voulue, l’a cherchée, est allé jusqu’au bout de la relation. Mortellement blessé, il a continué à aimer ceux qui lui faisaient du mal. Jésus, c’est Dieu qui entre par amour dans nos relations, pour les vivre avec nous et recevoir la blessure de la relation.

Avec les disciples sur le chemin d’Emmaüs, il reprend l’initiative de la relation. Comme d’ailleurs dans tous les autres récits d’apparitions après sa résurrection.

Le moins que l’on puisse dire est qu’il est plutôt fraichement reçu : air sombre des disciples après la question de Jésus. Expression non verbale de leur désapprobation. Agressivité de la réponse de Cléopas. Visiblement, ces personnes n’ont pas du tout envie d’entrer en relation.

Ce sont des attitudes blessantes. Par ces attitudes, les disciples se blessent eux-mêmes. Mais Jésus ressuscité ne peut plus être blessé. Il veut la relation et l’on connaît la suite : la relation qu’il a cherchée débouche sur la joie.

Dans le récit d’apparition à Jérusalem qui suit le récit des pèlerins d’Emmaüs, nous voyons que Jésus garde les marques des blessures sur ses mains et ses pieds (Luc 24,40).

Après la résurrection, il les montre à ses disciples. Il se met à table avec eux pour manger du poisson. Il les envoie dans le monde pour qu’ils soient ses témoins, en leur donnant l’Esprit. Et, finalement, il les bénit (24,50). Que signifie pour nous d’être bénis par un Dieu aux mains transpercées ?

N’est-ce pas pour nous dire que nous n’aurons plus jamais à craindre de rencontrer les autres. Que nous pouvons aller dans tous les endroits avec cette ferme confiance, que si nous recevons une blessure, le Dieu qui a été lui-même blessé sera là pour nous accompagner.

Être béni par un Dieu qui est entré dans les relations jusqu’à vivre la blessure d’amour dans son corps, ne signifie-t-il pas que le plus important pour nous est de vivre les relations ?

Toute notre vie est une suite de relations les uns avec les autres. Comme Jésus les a vécues en se donnant aux autres, nous avons à les vivre en cherchant à faire de chaque rencontre un chef-d’œuvre.

Les disciples d’Emmaüs, puis ceux du cénacle de Jérusalem sont dans une grande joie après leur rencontre avec le Ressuscité.  Cette joie va les accompagner durant toute leur vie, même lorsque certains recevront la blessure du martyre.

C’est cette joie de la présence du Christ au milieu de nous, qui continue dans l’Église. La présence du Ressuscité au milieu de nous est constitutive de la vie de l’Église.

Elle est source de toutes les vocations aux différents services, aux ministères, à la vie communautaire ; elle renouvelle aussi toutes les structures. Sa présence est une lumière qui nous enveloppe et nous donne la force de réaliser sa volonté et de faire les pas en avant qu’elle nous demande.

Mais, pour avoir cette présence du Ressuscité au milieu de nous, il faut une condition : celle de ne pas fuir nos relations, qui comportent toujours le risque de la blessure.

Si nous avons cette disposition de risquer la relation dans le nom du Christ, c’est-à-dire en étant prêt à donner quelque chose de nous-mêmes aux autres, alors la présence du Christ pourra se rendre manifeste.

Il agit, appelle et produit le retournement des cœurs. Tant qu’il est là, c’est la fête de Pâques, c’est la vraie Église. L’Église est véritablement Église si Jésus est spirituellement présent, et il ne peut l’être que si, dans la foi et l’amour en lui, nous prenons le risque de la relation.

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Deux prières

Seigneur, nous avons été exposés à ta Parole

âpre et rugueuse, plus tranchante que le rasoir.

Que nous la laissions faire son œuvre en nous

en lui ouvrant résolument notre cœur

et en le fermant à toute insinuation du diviseur !

Ainsi, nous deviendrons ces « sages et prophètes »

que, dans ton amour, tu veux envoyer.

Comme les disciples d’Emmaüs nous te disons :

Reste avec nous, le jour baisse et la nuit approche !

Envoie-nous et rejoins-nous sur tous nos chemins !

****

Béni sois-tu pour Jésus, ton Fils que tu as envoyé

pour tracer un chemin d’espérance.

Il est entré dans nos prisons pour nous libérer.

Il a pris sur lui nos brisures pour nous guérir.

Il a aimé jusqu’à l’extrême pour nous réconcilier.

Par lui nous sommes délivrés de la peur de la mort.

En lui renaît l’espérance d’un monde nouveau, juste et en paix.

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Pour d’autres méditations sur Emmaüs, voir ici


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