Vienne, 18 octobre 2024. Devenir proche est le « style de Dieu ». Il l’a prouvé en s’incarnant dans le Christ. C’est la « logique de l’incarnation » qui nous conduit aussi à nous rendre proche des autres.
Pour François d’Assise tous les êtres sont à voir comme des proches. Il veut être le « frère universel ». Il faut donc leur accorder une attention permanente.
Au commencement il y a la proximité de Dieu, son amour pour nous. . Dans une méditation à une rencontre du mouvement des Focolari, ces jours à Vienne, la théologienne Gudrun Griesmayr rappelait ces paroles de Chiara Lubich:
« Père, devant toi, j’éprouve le besoin de me donner à toi, telle que je suis… Je sais que tu es proche de moi et que tu me considères comme ta fille ».
Cela a comme conséquence d’être proche de chacun. C. Lubich continue:
« Peu importe le nombre de personnes que tu rencontres au cours de la journée, du matin au soir : Vois Jésus en chacun d’eux. Si tu regardes tout avec des yeux simples, c’est Dieu qui regarde à travers tes yeux Et Dieu est amour, et l’amour veut conquérir pour unir.
Parce que l’homme est l’image de Dieu, il est créé comme amour. Mais l’amour qui est tourné vers lui-même est semblable à une flamme qui s’éteint parce qu’elle n’est pas alimentée. Regarde donc ton prochain avec amour, et aimer, c’est donner. L’amour est donc aimer et être aimé : c’est la trinité »…
« Regarde donc tout le monde avec foi, donne-toi à lui parce que tu veux te donner à Jésus, et Jésus se donnera à toi. La loi de l’amour est en effet : Donnez et l’on vous donnera aussi (Luc 6,38).
Par amour pour Jésus, laisse-toi « posséder par ton prochain », laisse-toi consumer par lui’, sois en quelque sorte l’eucharistie pour lui. Mets-toi entièrement à son service, car c’est le service de Dieu. Et le prochain se tournera vers toi et t’aimera. »
La parabole du Samaritain illustre cette proximité.
Dietrich Bonhoeffer le disait ainsi avec la question du maître de la loi qui demandait à Jésus : « Qui est donc mon prochain » ?
« Tu es toi-même le prochain. Va et obéis dans l’acte d’amour. Être son prochain n’est pas une qualification de l’autre, c’est son exigence envers moi, rien d’autre. A chaque instant, dans chaque situation, c’est moi qui suis appelé à agir. Je dois être le plus proche de l’autre. »
Etre proche signifie écouter
Une des plus belles prières de la Bible est celle de Salomon : « Donne-moi un coeur qui écoute », demande-t-il à Dieu qui s’était manifesté à lui (1 Rois 3,9).
Selon Bonhoeffer le premier service au frère est de l’écouter .. avec les oreilles de Dieu :
« Le premier service que l’on doit à l’autre dans la communauté, c’est de l’écouter. De même que l’amour pour Dieu commence par l’écoute de sa parole, de même l’amour pour le frère commence par l’apprentissage de l’écoute. C’est l’amour de Dieu pour nous qu’il ne nous donne pas seulement sa parole, mais qu’il nous prête aussi son oreille. Ainsi, c’est son œuvre que nous faisons pour notre frère, si nous apprenons à l’écouter.
Celui qui ne sait pas écouter longtemps et patiemment passera toujours à côté de l’Autre et finira par ne plus s’en rendre compte lui-même.
Celui qui pense que son temps est trop précieux pour le passer à écouter, n’aura jamais vraiment de temps pour Dieu et pour le frère, mais seulement pour lui-même, pour ses propres paroles et ses propres projets.
Mais il y a aussi l’écoute à demi-mot, avec la conscience de savoir déjà ce que l’autre a à dire. C’est l’écoute impatiente, inattentive, qui méprise le frère et n’attend que le moment où l’on pourra enfin parler soi-même.
Nous devons écouter avec les oreilles de Dieu, afin de pouvoir parler avec la parole de Dieu ». (Dietrich Bonhoeffer, de la Vie communautaire).
Chiara Lubich fait écho à Bonhoeffer, dans cette prière tirée du « Paradis de 1949 » (§§. 541-546):
« Seigneur, donne-moi tous les abandonnés… Dans mon cœur, j’ai éprouvé la passion qui submerge le tien pour l’abandon où le monde entier se débat.
J’aime chaque être malade et seul : même les plantes qui souffrent me font de la peine… même les animaux abandonnés.
Qui console leur peine ?
Qui pleure leur mort lente ?
Et qui étreint sur son cœur les cœurs désespérés ?
Donne-moi, mon Dieu, d’être dans le monde sacrement efficace de ton Amour, de ton être qui est Amour : d’être tes bras qui, brûlant d’amour, étreignent toute la solitude du monde »