Icône du Concile de Nicée en 325
Castelgandolfo, 29 mars 2025. L’année 2025 est riche d’événements oecuméniques: les 1700 ans du concile de Nicée qui a exprimé la foi chrétienne, la fête Pâques célébrée à la même date par toutes les Eglises, les cent ans de la première Conférence du christiannisme pratique, et les 60 ans de la levée des excommunications entre les Eglises catholique et orthodoxe. Le congrès dans les hauteurs de Rome a donné la parole à une brochette de théologiens qui ont dit la signification de cette riche année.
Les 1700 ans du Concile de Nicée
Pour la théologienne syro-orthodoxe Mirvet Kelli, le christianisme a apporté deux nouveautés absolues : l’incarnation et la Trinité. Mais au début du 4e siècle de nombreuses controverses et hérésies sont apparues, en particulier celle du prêtre alexandrin Arius qui a défendu l’éternité du seul Père, mais pas celle du Fils.
Pour en parler, l’empereur Constantin a convoqué dans sa résidence de Nicée les évêques du monde connu d’alors. Ceux-ci furent stupéfaits de son soutien : beaucoup portaient sur eux les cicatrices de la plus dure persécution contre les chrétiens, celle de Dioclétien, juste 25 ans auparavant.
L’œuvre principale de ce Concile a été la rédaction d’un credo confirmé par les conciles suivants. M. Kelli voit l’actualité de ce credo en quatre points : il est source d’espérance : le Christ est Dieu, mais aussi l’un des nôtres. Il donne une perspective radicalement nouvelle sur nos vies : Dieu est un Père qui nous aime et nous donne sa grâce. C’est un exemple d’équilibre entre unité et diversité, autorité et liberté. Enfin, il est un point de départ pour l’unité des Églises.
La date de Pâques, commune pour tous les chrétiens
Le concile a aussi établi une méthode pour déterminer une date commune de la fête de Pâques. Mais, la réforme calendaire du 16e siècle a introduit un nouveau calendrier qui n’a pas été suivi par les Églises orthodoxes. « Au lieu que Pâques soit la fête des fêtes, elle devint un point de désaccord entre chrétiens qui suivent deux calendriers différents », affirme M. Kelli.
En Syrie, d’où elle vient, les familles mixtes sont divisées quant à la date de Pâques. Enfant, elle se souvient que ses camarades musulmans se moquaient des chrétiens qui ne pouvaient pas se mettre d’accord sur une date commune. Aujourd’hui, elle est persuadée que « célébrer ensemble la résurrection de Jésus nous permet de dépasser les divisions du passé et de coopérer pour la gloire de Dieu ».
Cette année 2025, la date de Pâques est commune à tous les chrétiens. Une initiative œcuménique rassemblant plusieurs mouvements — Pâques ensemble 2025 – a lancé plusieurs actions, comme un séminaire en ligne et des visites auprès de plusieurs responsables d’Églises.
Un de ces mouvements est l’Assemblée interparlementaire sur l’orthodoxie. Kostas Mygdalis, conseiller de ce grand mouvement orthodoxe, est persuadé que célébrer Pâques à des jours différents ne peut plus se faire aujourd’hui. Cette pratique n’ouvre pas d’avenir d’espérance. Mais, il constate que les Églises orthodoxes ne sont malheureusement pas en mesure de comprendre ce problème. Elles craignent de changer les valeurs traditionnelles en unifiant la date de Pâques. Néanmoins, K. Mygdalis continue à espérer qu’un jour commun sera trouvé pour le jour le plus important de l’année, celui de la résurrection du Christ.
Je participe à « Pâques ensemble 2025 », comme représentant de l’initiative JC2033, que j’ai pu présenter lors de ce congrès, avant cette table ronde. JC2033 apporte l’horizon du pèlerinage vers 2033 et rappelle la centralité de la résurrection de Jésus.
Les 60 ans de la levée des excommunications entre les Églises orthodoxe et catholique

De gauche à droite: Sandra Ferreira, Martin Illert, Andrea Palmieri
La théologienne catholique Sandra Ferreira rappelle le pénible souvenir des excommunications entre Rome et Constantinople à la suite des querelles sur le Saint-Esprit – le « Filioque » – prononcées en 1054.
Plus de 900 ans plus tard, le patriarche de Constantinople Athénagoras rêvait d’unité avec Rome. Quand il apprit que le pape Paul VI se rendrait à Jérusalem, il décida de le rejoindre pour lui donner l’accolade. Cet événement est le début du « dialogue de la charité » entre ces deux Églises. Leur première décision a été de lever les excommunications.
Une touchante vidéo relate les paroles de Paul VI, il y a 60 ans : « J’ai eu la grande chance, ce matin, d’embrasser le patriarche œcuménique après des siècles et d’échanger avec lui des paroles de paix et de fraternité, ainsi qu’un désir d’union, de concorde et d’honneur pour le Christ et l’humanité. Espérons que ces débuts porteront de bons fruits, que la semence mûrira jusqu’à maturité ».
Quelles perspectives œcuméniques offrent les 1700 ans du Concile de Nicée ?
Mgr Andrea Palmieri, secrétaire adjoint du Dicastère pour la promotion de l’unité des chrétiens, explique que le pape François est très conscient de l’importance œcuménique de ce concile. Il a souhaité se rendre en pèlerinage à Iznick, le nom turc de Nicée. Cela serait sa seule visite à l’étranger durant l’année jubilaire de l’Église catholique. Cela indique l’importance que cet anniversaire a pour lui, comme en témoigne aussi le § 17 de la « Bulle d’induction » au jubilé de 2025.
A. Palmieri voit dans l’anniversaire de Nicée un grand potentiel œcuménique, en trois domaines :
La confession de la foi : la foi confessée à Nicée est partagée par toutes les Églises, aussi par celles issues de la Réforme. Le rétablissement de l’unité entre chrétiens ne peut être qu’une unité dans la foi. Le mot « symbole » signifie rassembler. Les principales vérités de la foi sont rassemblées dans le credo et il rassemble aussi les chrétiens. Ainsi, lorsque nous récitons le credo, nous devrions ressentir la douleur de nos divisions.
La date de Pâques : le concile a édité des critères pour la déterminer. Mais aujourd’hui, les chrétiens la célèbrent à des dates différentes. Le pape François a souvent souligné le scandale de cette division. Il a affirmé que l’Église catholique est disposée à recevoir toute proposition allant vers un consensus à ce sujet.
La théorie et la pratique conciliaires : le concile donne un bon exemple de discussion synodale sur une question doctrinale. La dimension synodale de l’Église n’est pas une nouveauté. L’Eglise catholique l’avait oubliée et sa revitalisation actuelle est un bon signe. De plus, il y a une interdépendance entre le cheminement synodal et le chemin œcuménique.
Les décisions prises cette année, il en est convaincu, marqueront le chemin œcuménique. « Avec la passion, le désir pour l’unité, ainsi que l’aide de Dieu, on peut faire de grands pas en avant ».
Le credo de Nicée donne une identité commune.
Le professeur Martin Illert annonce que le Conseil œcuménique des Églises considère 2025 comme une « année œcuménique ». Une assemblée mondiale du mouvement Foi et Constitution aura, en effet, lieu en Égypte pour les 1700 ans de Nicée. Cette année marque aussi les 100 ans du mouvement du Christianisme pratique (Life and Work).
Il souligne ce qu’a dit Mgr Palmieri : le concile de Nicée a contribué de manière décisive à exprimer la foi de l’Église. Son credo unit aujourd’hui les Églises et nous relie à l’Église ancienne et à travers les siècles. Notre unité est déjà réelle en attendant que Christ soit tout en tous. Notre lien avec lui doit être le critère au-dessus de tous les critères
Le concile de Nicée nous rappelle aussi que la conciliarité et la synodalité sont fondamentales pour la vie de l’Église. Dans l’Église protestante d’Allemagne, la déclaration de Barmen qui s’est opposée au nazisme, en 1934, en a été un exemple.
Si on se souvient de nos racines communes, on est dans une autre logique que le confessionnalisme. Nous ne nous définissons pas les uns contre les autres, car nous nous référons à une identité commune. Mais, la prière et l’amour réciproque doivent être mis à la base de tout. Ils inspirent la réflexion des théologiens et la mission commune.
Martin Hoegger
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