Castelgandolfo, 26 mars 2025. Lors du congrès du mouvement des Focolari, quatre théologiens de différentes Églises ont partagé ce que représente pour eux le dialogue : dialogue de vie, du cœur, de la prière, mais aussi sur la doctrine. Des formes de dialogue qui ne sont pas à opposer, mais à articuler les unes avec les autres.
Un dialogue de vie
Pour le théologien anglican Callan Slipper, la première chose à faire est de construire une relation authentique. Le dialogue échoue quand l’amour vient à manquer. Cela signifie prendre soin les uns des autres. C’est un « dialogue de vie » qui consiste à être ensemble avec toute notre humanité. Des relations transformées nous ouvrent à la vérité et à un meilleur discernement, et, finalement, à Jésus, la réalité des réalités. Pour trouver la vérité, nous avons donc besoin de grands cœurs.
Dans l’évangile de Jean, Pilate pose la question : « qu’est-ce que la vérité ». Jésus y avait répondu : « Je suis la vérité, le chemin et la vie » (Jean 14,6). La vérité n’est pas une formule, mais une personne. Elle veut être parmi nous et nous donner sa lumière. Nous devons alors faire tout notre possible pour comprendre notre prochain et surtout l’aimer plus profondément pour que la lumière du Christ se manifeste parmi nous.
Il s’agit de marcher avec Jésus, car le dialogue n’est jamais statique. Nous grandissons dans sa compréhension en marchant ensemble comme les disciples sur la route d’Emmaüs. Dans l’évangile de Jean, Jésus nous dit que la qualité de l’amour que nous devons avoir les uns envers les autres a la forme de la croix : « aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés » (Jean 13,34). Paul dit la même chose en nous appelant à avoir entre nous les sentiments qui sont en Jésus (Phil. 2.5). C’est le cœur de l’œcuménisme et du christianisme. Quand nous marchons ainsi, le Ressuscité s’infiltre au milieu de nous, en nous introduisant dans son mystère pascal.
« L’œcuménisme réceptif », dialogue du coeur
La théologienne suédoise Nausikaa Haupt explique que « l’œcuménisme réceptif » (ou « œcuménisme de la réception ») invite à accepter nos vulnérabilités. Initiative du théologien britannique Paul Murray, cette démarche se demande ce que notre tradition peut recevoir d’une autre et découvrir ce qui a besoin d’être guéri dans la nôtre. Cette forme d’œcuménisme a aussi été appelée « œcuménisme du cœur ». Il consiste à mettre en pratique la fameuse parabole de la poutre et de la paille.
Cette méthode a été mise en œuvre dans le dernier document de dialogue entre les Églises catholique et anglicane. Elle implique un certain niveau de confiance et d’humilité, car on se dévoile personnellement. Ces deux vertus sont aussi la condition du « processus synodal » que l’Église catholique est en train de vivre et où les mots clés sont « communion, participation et mission ». L’Esprit-Saint en est le protagoniste.

De droite à gauche, Augustinos Bairactaris, Nausikaa Haupt, Callan Slipper.
Dialogue et prière commune.
Le théologien orthodoxe grec Augustinos Bairactaris partage une expérience de prière en petit groupe avec des chrétiens de différentes Églises, dans le cadre du mouvement des Focolari. Une expérience qui l’a marqué. Prier ensemble est le fruit de l’unité spirituelle et découle de l’amour réciproque. Cette prière conduit à la paix. à la réconciliation et à l’unité dans la diversité. Elle lui a fait comprendre qu’il faut aller au-delà des fautes historiques du passé et mettre en avant notre identité commune en Christ plutôt que notre identité confessionnelle.
En priant ensemble nous témoignons que nous faisons avant tout confiance à Jésus. Cette prière commune a été un moment déterminant dans la vie d’A. Bairactaris. Il y a fait l’expérience de Jésus-Christ au milieu de nous qui nous unit déjà. Sa présence n’est pas une métaphore, mais quelque chose de réel, où l’on partage la souffrance, mais aussi la joie de l’autre.
Et la doctrine dans le dialogue ?
Karen Petersen Finch est l’autrice d’un livre sur l’œcuménisme vécu à la base (« Grassroots Ecumenism »). Théologienne réformée américaine, elle partage son expérience sur le dialogue doctrinal avec des laïcs. Ce dialogue permet une meilleure compréhension de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ ; il se fonde sur la Bible, la confession du Dieu trinitaire et sur le témoignage de l’Église primitive.
Elle a constaté que les laïcs peuvent comprendre en profondeur la doctrine de leur propre Église et dialoguer habilement avec celle d’autres Églises. Elle pense aussi que le travail des experts sur l’unité de l’Église n’est pas terminé tant que les laïcs n’y participent pas dans leur contexte local.
D’autre part, le témoignage, le service et la justice partagés sont merveilleux, mais l’unité n’est pas solide si nous ne travaillons pas également à un accord sur la doctrine, aussi difficile que puisse paraître la conversation ou aussi lointaine que semble l’unité doctrinale.
Le dialogue local est une œuvre du Saint-Esprit. Il approfondit notre foi en Jésus-Christ et l’engagement pour son Évangile. K. Petersen termine par cette belle prière : « Je prie pour que les graines plantées poussent, que davantage de personnes connaissent la joie de l’unité dans le Saint-Esprit grâce au dialogue dans leur quartier, les fortifiant dans l’amour et le témoignage grâce à l’élaboration d’un point de vue commun fondé sur le don de Jésus ».
Martin Hoegger
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