Durant cette heure où nous faisons mémoire de la mort de Jésus, nous écoutons le « Stabat Mater » de Josef Gabriel Rheinberger, dans la chapelle de Saint Loup : « Elle était debout, la Mère, malgré sa douleur, En larmes, près de la croix, Où son Fils était suspendu….
Son âme gémissante, Contristée et dolente, Un glaive la transperça.
Qu’elle était triste, anéantie, La femme entre toutes bénie,
La Mère du Fils de Dieu ! Dans le chagrin qui la poignait,
Cette tendre Mère pleurait Son Fils mourant sous ses yeux. »
Durant ces quatre jours, de jeudi saint au dimanche de Pâques, une quarantaine de personnes participent – comme chaque année – a une retraite spirituelle sur le thème de l’espérance.
Une parole nous guide – celle que la communauté de Saint Loup vit durant cette année : « l’espérance ne trompe pas ». (Romains 5,5)
Ce matin nous nous posions la question quelle espérance animait Jésus lorsqu’il criait du haut de sa croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »
Était-il complètement désespéré, s’identifiant à ceux qui ont perdu toute espérance ?
Jésus était-il entré dans l’enfer dont Dante disait à son propos : « Vous qui entrez, laissez toute espérance » !
Poser cette question, c’est déjà y répondre : c’est bien l’espérance de la résurrection et du retour vers le Père qui soutenait Jésus tout au long de son terrible martyre.
Le psaume 22 qui commence avec cette poignante expérience de l’abandon se termine en effet par l’espérance de la résurrection :
« C’est de toi que viennent mes louanges dans l’assemblée nombreuse ; je m’acquitterai de mes vœux devant ceux qui te craignent. » Psaume 22,26
Après avoir médité sur l’espérance du Fils, réfléchissons sur l’espérance de la mère !
Y avait-il encore une once d’espérance en elle alors qu’elle assistait, impuissante au martyre de son Fils ?
La douleur de l’épée qui transperçait son cœur à ce moment avait-t-elle détruit toute espérance en elle ?
Personne ne peut répondre à ces questions.
Alors venons-en au texte !
Que dit-il : « Auprès de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Clopas, et Marie-Madeleine. » Jean 19,25
« Stabat Mater » : « Elle était debout la mère, malgré sa douleur »
Les deux premiers mots de ce magnifique chant reprennent le texte évangélique.
Il décrit d’une manière poignante la douleur de la mère du Bel Amour et se termine par une invocation à Marie de nous aider à traverser nos épreuves dans la foi, l’espérance et l’amour qui l’habitaient.
Pour les protestants qui n’invoquent pas Marie, il suffit de remplacer l’invocation à Marie par l’invocation à l’Esprit saint : prier l’Esprit Saint qui habite Marie.
« Stabat Mater » : Elle était debout la mère, au pied de la Croix !
A l’intérieur de la cathédrale Notre Dame de Paris, ravagée par les flammes, quel a été l’étonnement des pompiers de découvrir la croix lumineuse et sous elle l’autel représentant Marie au pied de la croix recevant son Fils. Les deux intacts, alors qu’autour d’eux jonchaient les débris de la voûte.
Une étonnante photo de la croix lumineuse au milieu de la désolation en témoigne.
N’est-ce pas comme un appel à aller à l’essentiel : à nous tenir près de Jésus, à regarder à lui et à croire, aimer et espérer jusqu’au bout ?
Pour l’auteur du Stabat Mater, il est clair que ce sont la foi, l’espérance et l’amour qui ont continué à habiter le cœur de Marie.
Ce sont ces « vertus théologales » qui lui ont permis de rester debout et de ne pas s’effondrer : « Stabat Mater » – « Elle était debout, la Mère ».
Cette terrible douleur qui la transperçait n’a pas pu détruire trente-trois ans de vie de communion avec son Fils.
Les paroles de vie éternelle de son Fils continuaient à habiter son esprit, comme l’annonce de l’archange au moment de l’Annonciation, comme le chant des anges autour de la crèche.
Elle n’a pas non plus oublié la prophétie de Siméon : « et toi, femme une épée te transpercera le coeur » !
En quoi l’exemple de Marie dans son Stabat nous encourage-t-il aujourd’hui quand l’épreuve surgit et la douleur nous submerge ?
Je vois deux encouragements :
Comme Marie nous avons à faire habiter en nous les paroles de Jésus. Elle les a toujours méditées et repassées dans son cœur.
Apprenons par cœur de nombreux psaumes et passages des évangiles !
Ce sont ces paroles qui nous gardent du désespoir et fortifient en nous l’espérance que Dieu va agir promptement dans les temps d’épreuve.
Puis, Marie n’a pas été seule devant La Croix de son Fils, mais deux autres femmes étaient avec elles – également prénommées Marie.
Et il y avait le disciple bien aimé que Jésus lui a donné pour la soutenir.
Alors, dans les temps de souffrances, demandons à Jésus de mettre sur notre chemin des amis avec qui nous pouvons partager notre douleur, dire nos interrogations, avancer et être encouragés.
Comme Marie, ne restons pas seuls. L’espérance a besoin de communion fraternelle pour être nourrie.
Quelques prières pour cette heure :
1.
Me tenir devant toi avec les trois Marie,
faire silence et écouter tes sept paroles.
Te dire ce qui m’habite :
mes pourquoi sans réponses,
mes erreurs et mes échecs,
et mes projets inachevés.
Je suis ce disciple bien-aimé
appelé à accueillir ta mère
et à soutenir ceux qu’une épée transperce.
Je suis ce disciple bien-aimé :
désaltère-moi par ton Esprit !
Pardonne mes transgressions !
Accomplis en moi ta volonté !
Donne-moi tout entier à toi
et introduis-moi dans ton Paradis !
2.
Père, quand je rentre dans ma chambre
Et te prie dans le secret, là tu me vois.
L’Évangile me le dit et me le promet.
Alors donne-moi de le croire et de le vivre !
Au moment de me tourner vers toi,
Que je me rende transparent à toi.
Devant toi, je ne peux faire semblant
Ni paraître comme dans la société.
Oui, Père, verse ton Esprit en moi
Afin que je prie avec le cœur !
Viens visiter ton temple
En compagnie de ton Fils !
Je ne te chercherai plus en dehors
puisque ton Royaume est intérieur.
Comme Marie, qui gardait ta Parole,
Je vivrai au dedans pour te rencontrer
Et recevoir ta vive présence.
3.
Seigneur, au pied ta croix,
Marie est devenue mère du disciple bien aimé.
Elle est devenue aussi mère en vivant ta parole,
comme elle a été appelée à faire la volonté de Dieu
quand l’ange est venu la visiter à Nazareth.
Pour devenir pères ou mères spirituels,
donne-nous de faire la volonté du Père,
en gardant Sa parole.
Quand vient l’épreuve, comme une désolation,
renouvelle en nous l’encouragement de ton Esprit
afin que, comme Marie, nous puissions rester debout.
Donne-nous aussi la force et le courage
de nous détacher de nos œuvres
quand tu nous le demandes.
Ainsi serons-nous rendus capables
d’aider d’autres personnes
à naître à la foi en Christ.
4.
Je suis errant et humilié…
mais ta bonté se renouvelle chaque matin (Lamentation 3,19s)
Avec Abraham errant dans le désert
Avec Isaac lié sur le rocher
Avec Moïse exposé sur les eaux
Avec Israël traversant la mer
Avec David accablé par ses transgressions
Avec Jérémie déprimé dans un puits
Avec Jean-Baptiste privé de liberté
Avec Pierre pleurant son reniement
Avec Marie debout au pied de ta croix
Avec Paul pourchassé par ses ennemis
Avec la nuée des témoins marchant vers toi
Je viens à toi tel que je suis
Mais surtout confiant que tu viendras
Au moment où je ne m’attends pas
Pour me redire que tu m’aimes.
5.
La nuit et le silence !
La nuit où je ferme les yeux
sur ce monde vain et futile.
La nuit où je m’expose à toi
pour me laisser voir par toi.
La nuit où tu m’ouvres le coeur
sur ce que mes yeux ne peuvent voir.
La nuit où tu me rejoins
dans ma solitude, source de communion.
Le silence où je vide mon esprit
de toute préoccupations.
Le silence où je médite ta Parole
en la reliant à ma vie.
Le silence où j’invoque ton Esprit
pour qu’il remplisse mon néant.
Le silence où je prie comme Marie,
femme d’accueil et d’écoute.
Pour te voir et t’entendre,
pour te manifester au monde,
Montre-toi dans mes nuits !
Parle-moi dans mes silences !
6.
Mon repos est en toi, Père.
Avant la création de tout
tu connaissais tout de moi.
Mon repos est dans ta Parole.
L’accueillir et la vivre
sont ma source d’énergie.
Mon repos est dans ta volonté.
En faire ma nourriture
m’établit sur le roc.
Mon repos est en toi, Jésus.
Faire tout pour toi et en toi
qui est doux et humble de cœur.
Mon repos est dans ce prochain
que tu mets sur mon chemin.
Que je discerne en lui ton image !
Mon repos est dans ton commandement
que tu appelles nouveau, ton testament :
nous aimer les uns les autres en toi.
Mon repos en toi, ô Ressuscité.
Se réunir en ton nom
attire ta paix et ta joie.
Mon repos est dans ton repas.
Partager ton pain et ton vin
introduit le ciel et la terre parmi nous.
Mon repos est dans l’accord de nos cœurs.
Répondre à ta prière pour l’unité
nous fait tressaillir d’allégresse.
Mon repos est en toi, Esprit saint.
Ton souffle m’anime
et m’envoie sur le chemin de Jésus.
Mon repos est d’imiter Marie.
Par toi, elle est restée debout
alors qu’une épée la transperçait.
Mon repos est fragile.
Toujours à reprendre ici-bas,
il ne sera parfait qu’au dernier jour.
7.
Comme Marie,
nous voulons nous encourager
à accomplir ce que tu nous dis.
Ta Parole est à vivre : vivifie-la en nous!
Ta Volonté est à faire: aide-nous à la discerner !
Dans les manques et les abandons
que nous avons, un jour, à traverser,
ranime en nous la confiance!
Tu as éprouvé nos soifs sur ta Croix:
Que toujours nous regardions à toi!
Tu es le Ressuscité parmi nous :
Que jamais nous en doutions!
Tu promets la joie du vin nouveau:
Qu’aujourd’hui nous la goûtions!
Viens bientôt, Seigneur Jésus-Christ!
Prépares ton épouse à ta rencontre!