Arcabas visitation

Rencontrer, visiter, se mettre au service : la vocation « mariale » du chrétien (Luc 1,39-45)

Le chemin que suit Marie peut devenir celui de tout disciple. Il est exemplaire. Comme Abraham est Père des croyants, Marie est Mère des croyants, dans le sens, qu’elle a ouvert un chemin de confiance.

Quelles sont les étapes de ce chemin de confiance ? J’en vois trois dans notre récit.

Marie est rencontrée par l’Ange. Elle sort pour visiter sa cousine Elisabeth. Elle se met à son service et lui communique la présence du Christ.

 

1. Rencontrer

Tout commence par l’intervention de l’Esprit saint dans la vie de Marie à laquelle Marie répond par la confiance.

L’Évangile de la Visitation de Marie à Élisabeth nous montre la promptitude de Marie à répondre au Seigneur : « Je suis la servante du Seigneur ».

Grâce à sa réponse, elle permet à une réalité nouvelle de se former en elle : Dieu s’incarne en elle !

C’est le pivot de l’histoire de notre humanité : Dieu devient un homme pour nous rejoindre, vivre avec nous et introduire dans notre monde sa vie et sa lumière.

Un jour, à nous aussi, l’Esprit saint a visité nos vies et nous a invités à la confiance.

Si nous disons oui comme Marie, un trait de lumière est alors entré dans nos vies et devient la lumière à travers laquelle nous regardons désormais le monde.

Comme le Christ a grandi en Marie, il grandit spirituellement en nous !

Jusqu’à ce que nous puissions dire « ce n’est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi » (Galates 2,20)

 

Dire oui

J’aimerais vous partager une expérience qui a été déterminante pour moi. Une expérience où j’ai dit « oui » et où j’ai vu naître une réalité toute nouvelle dans ma vie.

A l’âge de 18 ans je me posais beaucoup de questions sur le sens de ma vie. Je me demandais quelles études commencer. J’étais en particulier féru de philosophie et de littérature. Mais je ne cherchais pas seulement la sagesse. Je voulais aussi connaître Dieu. Un jour j’ai annoncé, à la surprise de ma famille et de mes amis, que je m’étais en faculté de théologie à Lausanne.

J’étais attiré par l’étude de la religion et pensais que j’allais trouver ma voie dans la théologie. Mais au cours de cette année d’études, plus j’avançais, plus les questions s’accumulaient et moins je recevais de réponses. J’avais commencé agnostique ; après dix mois je suis devenu athée.

Je me souviens qu’un jour je suis entré dans une église et j’ai écrit ma révolte sur le pupitre de la chaire : « Dieu n’existe pas » ! J’ai décidé alors d’arrêter ces études qui n’avaient plus de sens pour moi.

Cependant la question du sens continuait à m’habiter. Quelques temps plus tard, j’ai rencontré un chaleureux provençal qui m’a invité à participer à une rencontre à Aix-en-Provence, dans une faculté de théologie protestante qui venait d’ouvrir ses portes. J’ai accepté de m’y rendre, à vrai dire plus attiré par le soleil de Provence que le soleil de Dieu.

Pourtant c’est là qu’il m’attendait. Lors d’une conférence, une parole de l’Evangile a transpercé mon cœur. Le soir je me suis mis à genoux dans ma chambre et un seul mot est sorti de ma bouche : « pardon ». J’étais surpris : à qui avais-je dit ce petit mot ? A cette époque j’étais en conflit avec beaucoup de personnes et en avais blessé plusieurs. Au fond de moi, je savais pourquoi j’avais dit ces six lettres.

Le lendemain, alors que je rentrais chez moi en train, à la sortie d’un tunnel, j’ai fait une profonde expérience de l’amour de Dieu. Une force très douce m’a pénétré, m’a saisi de l’intérieur. Cette lumière du coeur m’a retourné comme une crêpe. J’ouvre alors ma bible et je suis tombé sur le passage de la première lettre de saint Jean : « Dieu est amour, celui qui demeure dans l’amour, demeure en Dieu ».

Alors tout s’est éclairci à la lecture de ce passage. Oui, Dieu existe ; il est amour et sa lumière m’habite. En un instant, j’ai compris cela. Tout prenait sens. Cette expérience est restée l’axe spirituel de ma vie.

 

Prendre chaque jour un temps pour « la Rencontre »

Prenons chaque jour, un temps pour le rencontrer, ou plutôt nous laisser rencontrer par lui !

La prière c’est d’abord cela : l’écouter, l’accueillir, nous exposer à lui, lui laisser dire qu’il nous aime et nous bénit de sa grâce immense, imméritée.

Comme il a dit à Marie : « Réjouis-toi Marie, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi ; tu es bénie entre toutes les femmes et Jésus ton enfant est béni »…Je lui laisse me dire « Réjouis-toi, Martin, comblé de grâce, le Seigneur est avec toi… »

C’est ainsi que je comprends et prier cette vieille prière de l’Avec…dont j’ai transformé la deuxième partie : « Saint Esprit, amour de Dieu, visite-nous et sanctifie nous, maintenant et à l’heure de notre mort » !

Je dis tout cela dans le livre que je viens de publier avec Sœur Marie Bosco : «Les Perles du cœur. Le rosaire autrement pour catholiques et protestants »

 

2. Se lever, sortir et visiter

La deuxième étape est de se lever et de partir. Marie partit visiter sa cousine Elisabeth.

Luc écrit que Marie, après avoir entendu l’ange lui dire qu’Élisabeth était enceinte, court aussitôt chez elle. « En hâte », note l’évangéliste.

L’Évangile nous presse toujours, il nous pousse à quitter nos habitudes, nos préoccupations et nos soucis personnels.

Et que de questions Marie devait-elle avoir à cette heure, après que la Parole de Dieu eut complètement bouleversé sa vie !

Quand Dieu agit dans nos vies, nous devenons actifs, inventifs. Les choses ne restent pas comme avant. Nous sommes mis en route et allons à la rencontre des autres.

Je reviens à l’expérience que je vous ai partagé tout à l’heure.

De retour à la maison je me suis rendu chez les personnes que j’avais blessées et je leur dit ce petit mot que j’avais prononcé dans ma chambre à Aix-en-Provence : « pardon ».

A chaque fois, c’était une nouvelle expérience de lumière. J’avais compris que la lumière du Christ m’attendait chez les autres, en particulier dans les plus démunis et les plus blessés. Faire sa volonté d’amour et de réconciliation nous revêt de sa lumière.

Ensuite j’ai cherché le contact avec d’autres chrétiens. Jusqu’à ce jour j’avais vécu en solitaire. Dorénavant j’avais besoin de rencontrer d’autres croyants. Je découvrais la lumière de Jésus ressuscité éclairant ceux qui se rassemblent en son nom. Le fruit de la communion en lui est la lumière !

 

3. Se mettre au service

La troisième étape est de nous mettre au service des autres. C’est ce que fait Marie : elle va auprès de sa cousine pour l’aider dans sa grossesse.

Mais pas seulement cela. Elle va auprès d’Elisabeth pour lui communiquer le Christ qui habite en elle, ainsi qu’à Jean-Baptiste.

La vocation de Marie est de donner la joie du Christ au monde.

Dès qu’elle voit la jeune Marie entrer chez elle, Elisabeth se réjouit profondément jusque dans ses entrailles. Avec Jean-Baptiste en son sein qui tressaille d’allégresse. Ils sont les premiers bénéficiaires de cette joie.

A Noël Marie, donne le Christ en le mettant au monde pour la joie de l’humanité tout entière, les proches et les lointains, les bergers et les mages.

Donner le Christ aux autres, c’est aussi la vocation « mariale » de chaque chrétien ! Notre vocation est de donner la joie au monde, le Christ aux autres.

L’Évangile nous met debout et nous pousse hors de nous-mêmes pour nous placer aux côtés de ceux qui souffrent ou qui sont dans le besoin.

 

Ta vie ne t’appartient pas

Je pense aussi à ces diverses étapes en considérant l’appel qu’une sœur de Saint Loup avait reçu : se lever, aller vers les autres et les servir. En effet dans un moment de grande détresse, elle avait reçu la visite de Jésus qui lui a dit : « Ta vie ne t’appartient pas, lève-toi et va travailler pour moi ». Cela a bouleversé sa vie et l’a orienté vers les pauvres qu’elle a aimés et servis.

Toujours à nouveau le Christ vient et revient à nous pour nous parler, nous appeler à nous lever (ou nous relever après une chute), à sortir de nous-mêmes et à aller vers les autres en se mettant à leur service.

Rencontrer Jésus, visiter les autres et les servir, c’est la logique fondamentale de la vie chrétienne.

C’est aussi la vocation de la communauté chrétienne : après avoir rencontré le Christ dans le culte, elle sort, visite et se met au service par l’action et l’annonce de l’Evangile.

A travers sa Parole, son Repas, la prière et l’onction, Il vient à nous aujourd’hui pour nous faire entrer dans cette nouvelle logique.

Comme à Marie, qu’il nous donne d’y répondre « avec hâte » !

 

Une prière 

Chaque matin, tu me dis : « je suis avec toi,

sois comblé de joie, mon ami » !

Chaque matin, tu me dis : « lève-toi et sors,

partage ma joie avec mes amis » !

Chaque matin, tu me dis : « mets-toi à mon service,

rencontre ma joie dans mes amis » !

Seigneur, ce matin, je te redis : « je suis ton ami.

Que ta joie m’habite » !


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