sukkot nations Jerusalem

Dieu préfère-t-il l’unité ou la diversité ?

On peut se demander : Dieu préfère-t-il, en priorité, l’unité ou la diversité ? Laquelle des deux est la plus chère à Dieu ? Trois textes bibliques nous aident à mieux comprendre la réponse à une telle question. Le texte d’Ésaïe (2,2-5) parle d’une seule montagne, d’une seule Jérusalem, d’une seule maison du Seigneur, mais de plusieurs peuples et nations qui se dirigent vers le même lieu pour y demeurer ensemble.

 Dans sa première épître aux Corinthiens (12, 12-21), Saint Paul parle d’un seul corps mais en insistant que celui-ci est constitué de plusieurs membres avec des fonctions diverses, chaque membre ayant son rôle vital pour l’intégralité du corps.

Dans le passage de l’évangile de l’évangile de Luc (13,31-35) il est mentionné également une seule poule qui désire rassembler toute sa couvée sous sa protection, en appelant tous ses poussins sous ses ailes.

Dans ces trois textes, unité et diversité vont ensemble et sont présentées dans une tension créatrice :

A. La trajectoire et le but final sont les mêmes, mais ceux que se dirigent vers la Jérusalem du Seigneur sont et restent divers et différents. Ils ne sont pas appelés à devenir une masse amorphe et impersonnelle ; l’unité comme Dieu la veut n’est pas une uniformité.

B. Les membres d’un corps se nourrissent et partagent la vie commune du corps. Un même sang circule dans leurs veines, mais ils sont appelés à apporter leur contribution à la vie unique du même corps en restant divers. Un corps reste fort et vivant quand ses différents membres fonctionnent bien. Plus il perd de sa diversité, plus il est entrainé vers sa mort. Il en va de même pour l’Église : si, pour différentes raisons certains membres (ou ministères) du Corps du Christ cessent d’apporter leur contribution, le Corps commence à souffrir.

C. La poule appelle tous ses poussins sous ses ailes avec un amour maternel protecteur. Ceux-ci dans leur diversité vivent leur unité en se rassemblant dans leur totalité sous les mêmes ailes. La mère les nourrit et les protège des prédateurs. Pendant les nuits fraîches, les poussins survivent et résistent au gel en restant ensemble, unis l’un à l’autre sous la protection des ailes de leur mère.

Dieu nous appelle donc à l’unité ; l’unité qu’il veut n’est pas uniformité mais diversité convergente, solidaire et communautaire.

Dieu ne choisit pas entre l’unité et la diversité. Dieu aime l’unité dans la diversité. Dieu aime la diversité réconciliée.

Aujourd’hui les Eglises se sont rapprochées les unes des autres. Elles peuvent prier ensemble et servir la société, en prenant soin des plus faibles et malades. Mais elles sont encore divisées, car elles sont incapables de se réunir autour de la même table de communion pour recevoir la sainte cène.

Toutefois, nos divisions ne touchent pas Dieu, ni son plan pour le monde et son Église. La Jérusalem céleste reste la même, de même le Corps du Christ, ainsi que la poule avec ses ailes protectrices. Le problème n’est pas avec Dieu mais avec nous.

Nous utilisons en effet la Parole de Dieu et les terminologies chrétiennes anciennes consacrées mais nous leur donnons souvent un sens qui va dans la direction de notre propre être. Une direction contradictoire et confuse, dominatrice ou relativiste.

 

Marcher ensemble vers Jérusalem.

On parle souvent d’unité, d’un seul Seigneur et d’un seul Corps qui est son Église, mais on est tenté de voir l’unité comme une uniformité. On parle de la Jérusalem céleste des derniers temps des Écritures, mais certains la voient parfois comme leur propre Jérusalem. Ou encore, chacun voudrait établir sa propre Jérusalem, entourée de murs et avec des portes fermées, pour être seuls avec le Seigneur.

On commence alors à se comporter comme si cette Jérusalem était la nôtre. Nous demeurons dans le temple du Seigneur mais après un certains temps on oublie que c’est Son temple. On se comporte comme s’il nous appartenait. Ceux qui ne sont pas comme nous n’y ont pas accès. On s’installe confortablement dans la maison du Christ et on oublie l’esprit de Son Évangile. Or son désir est de rassembler autour de lui toute l’humanité, non seulement ceux qui pensent comme moi.

J’ai toujours été frappé par un texte de l’Apocalypse qui parle de cette Jérusalem céleste, le Royaume de Dieu :

« La ville n’a besoin ni du soleil ni de la lune pour l’éclairer, car la gloire de Dieu l’illumine et l’Agneau est sa lampe. Les nations marcheront à sa lumière, et les rois de la terre y apporteront leurs richesses. Les portes de la ville resteront ouvertes pendant toute la journée ; et même, elles ne seront jamais fermées, car là il n’y aura plus de nuit. On y apportera la splendeur et la richesse des nations ». (Ap 21,22-26).

Le Seigneur est au milieu d’elle, chacun y apporte ses richesses, ses portes sont ouvertes. Dans la lumière de la présence du Seigneur, il n’y a pas de repli sur soi : on peut accueillir l’autre et se réjouir qu’il soit là.

Cela, nous pouvons déjà commencer à le vivre dans la mesure où le Seigneur est parmi nous, comme il le promet : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis parmi eux ». Si nous nous ouvrons à lui, nous pouvons nous ouvrir les uns aux autres et n’exclure personne. Nous pouvons alors élargir notre communion aux personnes les plus diverses et les inviter à y entrer.

C’est ce que j’ai pu vivre lors d’une rencontre pour la paix à Sarajevo organisée par la communauté de S. Egidio, il y a quelques temps. Deux jours intenses de rencontres entre chrétiens, juifs, musulmans et membres d’autres religions. Dans un lieu qui a souffert et continue à souffrir des oppositions entre les communautés.

Le dernier moment de ce cette rencontre restera à jamais gravé dans ma mémoire. Il s’est conclu par une prière pour la paix. Les membres de chaque religion ont prié dans leur lieu de culte particulier, mais en même temps. C’est ainsi que les chrétiens des diverses Eglises se sont rassemblés pour une prière devant la cathédrale catholique de Sarajevo.

Dans un périmètre de quelques centaines de mètres, les musulmans se sont réunis dans la grande Mosquée de la ville et les juifs dans la synagogue. Et les membres des autres religions dans d’autres endroits.

Puis, à la fin de ce temps de prière où chacun a prié pour la paix, les membres des diverses religions se sont retrouvés sur la rue principale de la vieille ville. Ils ont ensuite marché ensemble vers une place pour la clôture de la rencontre.

Durant cette marche, j’ai parlé avec un musulman du Maroc, puis avec un jeune bouddhiste japonais.

Il y avait beaucoup de joie et d’élan à se rencontrer les uns les autres. J’avais un peu le sentiment de vivre un commencement de cette prophétie d’Esaïe, reprise par l’Apocalypse, que les nations marcheront ensemble à la lumière de Dieu pour monter vers la montagne du Seigneur ou vers la Jérusalem céleste.

 

Conclusion

En conclusion, je reviens à l’image que le Christ donne de la poule et de sa couvée : elle appelle à l’unité sous ses ailes. Je la trouve suggestive et pertinente. La poule appelle ses poussins chaque fois qu’elle trouve quelque chose à manger, mais elle ne touche pas la nourriture avant que tous en aient eu suffisamment.

Je trouve aussi très intéressant que les poussins eux-mêmes s’appellent les uns les autres quand ils trouvent quelque chose et sont prêts à partager. Dans cette première phase de leur vie, il n’y a pas d’esprit de domination, d’arrogance, ou d’individualisme.

C’est à la découverte d’un tel esprit que nous appelle le Seigneur. Yves Congar, un grand artisan d’unité, disait qu’on ne peut franchir la porte de l’unité qu’à genoux : avec humilité, en acceptant l’importance de l’autre et de la diversité.

La poule appelle et les poussins appellent aussi. Une poule qui n’appelle plus et ne s’intéresse plus à sa couvée perd sa vocation. De même, une Eglise qui n’est plus missionnaire est une Eglise démissionnaire.

Nous avons une double vocation :

  • nous appeler les uns les autres à l’unité dans la diversité telle que le Seigneur la désire
  • témoigner au monde du message de joie des évangiles

Que le Seigneur nous donne d’y répondre de mieux en mieux !

 

Prière 

Seigneur, tu as dit dans ton Evangile : « Jérusalem, Jérusalem, combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble sa couvée sous ses ailes ! Mais vous n’avez pas voulu » !

Ce désir d’unité continue à habiter aujourd’hui ton cœur.

Comme une tendre mère, tu veux rassembler dans une union d’amour ton peuple né de la semence d’Abraham comme ton Eglise née de la semence de l’Esprit, afin que ton Royaume de justice et de paix s’élargisse aux confins de la terre.

Tu rêves d’unité, Seigneur, et tu as donné ta vie pour réunir en toi l’humanité si diverse.

Tu appelles maintenant chacun pour réaliser avec toi ce rêve.

Qu’il devienne aussi de plus en plus le nôtre !

Donne-nous alors d’être fidèles à ta croix, par laquelle tu attires tous les hommes à toi.

En y contemplant ton amour qui s’est donné jusqu’au bout, nous découvrons aussi tout ce qui en nous résiste à tes appels répétés. 

Aussi au début de ce culte, nous reconnaissons nos divisions autant intérieures qu’extérieures.

Durant ce moment de silence, donne-nous de nous rendre transparents à toi !


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