Pierre cathedrale Foi et Constitution

Prières et gestes symboliques appelant à l’unité, lors des célébrations de la Parole à la Cathédrale de Lausanne

Une pierre de la cathédrale soulevée par les autorités des EglisesDepuis quelques années, nous faisons l’expérience que Dieu nous rassemble et nous unit, mais il ne nous nivelle pas. Nous le vivons en particulier lors des célébrations de la Parole à la cathédrale de Lausanne, où, chaque premier dimanche du mois, nous pouvons prier ensemble.

La Communauté des Eglises chrétiennes dans le canton de Vaud (CECCV) y a invité ses vingt Eglises membres et bien d’autres. Elles appartiennent aux diverses familles protestante, catholique, orthodoxe, évangélique-pentecôtiste. Mais y participent également plusieurs Eglises issues de la migration, des mouvements, des communautés et des œuvres ecclésiales. Dès 2004, plus de 100 célébrations nous ont rassemblés dans ce lieu.

Frère Alois, le prieur de Taizé, a écrit au sujet de ces célébrations : « Pour y avoir participé à plusieurs reprises, nous les frères de Taizé, nous savons combien votre initiative de célébrations de la Parole à la Cathédrale de Lausanne est précieuse pour aider les chrétiens à cheminer ensemble vers l’unité. Nous retrouver ensemble en présence de Dieu dans l’écoute de sa Parole, le silence et la louange, c’est déjà anticiper une unité. A travers une prière toute simple, l’Esprit Saint déjà nous unit. Humblement, dans une telle prière, nous apprenons à appartenir les uns aux autres. Et cela permet sans doute aussi au dialogue théologique d’avancer ».

Ces célébrations sont préparées à tour de rôle par une Eglise. Parfois plusieurs se mettent ensemble ou encore des mouvements ou des communautés. Toutes les Eglises et communautés sont invitées à y assister.

Durant ces célébrations, des gestes symboliques, des prières et des texte d’engagement ont été préparés en commun. Voyons-en quelques uns maintenant !

 

Une pierre de la cathédrale

Lors de la célébration des 75 ans du mouvement Foi et Constitution (août 2002), une pierre de la Cathédrale de Lausanne a été donnée par quatre familles d’Eglises présentes dans le canton de Vaud (le protestantisme historique représenté majoritairement par l’Eglise évangélique réformée, l’Eglise catholique romaine, l’Eglise orthodoxe et la famille évangélique-pentecôtiste).                                                        

Porter une pierre symbolise l’engagement à apporter ensemble au monde le ministère du Christ, pierre vivante de Dieu. C’était un appel à ne plus jeter les mauvaises pierres des blessures de nos divisions passées. Un appel à toujours faire mémoire de la pierre roulée lors de la résurrection du Christ, lui qui est à jamais la pierre d’angle de l’Eglise.

La pierre était posée au pied de la table de communion comme un appel visible à être des pierres vivantes, assemblées par notre foi et notre baptême en Christ. Elle signifiait aussi notre aspiration à partager ensemble le repas de notre Seigneur, en qui nous sommes un.

Cette pierre a été donnée par les autorités des Eglises locales aux présidents et dirigeants du Conseil œcuménique des Eglises et de Foi & Constitution, comme un encouragement à avancer sur ce chemin de communion. Elle a été soulevée par des représentants des Eglises d’ici, des communions mondiales et du Conseil oecuménique. Elle se trouve actuellement dans la chapelle du Centre œcuménique à Genève.

 

Un vitrail et une prière pour symboliser une diversité vraiment réconciliée.

Tous les trois ans nous avons eu une grande célébration qui remplissait la cathédrale. En septembre 2010, nous nous sommes rassemblés sur le thème « Ensemble et divers ». Pour l’illustrer un vitrail mobile a été monté ; il s’agit de 25 pièces composées chacune des sept couleurs de l’arc en ciel mis en place par autant de responsables des Eglises, communautés et mouvements. Une manière très parlante de signifier un appel à la communion entre les Eglises et les mouvements.

Vitrail mobileDurant ces célébrations, nous avons découvert notre diversité et nous nous en réjouissons.  C’est l’occasion très concrète de connaître les différentes manières de prier et de communiquer la Parole de Dieu. Donner cet espace aux communautés et mouvements est aussi une manière de les reconnaître et d’apprécier leur contribution.

Dieu a donné une extraordinaire diversité spirituelle à son peuple. Ces célébrations sont un bel apprentissage oecuménique ; elles nous encouragent à ne pas avoir peur de ce qui est différent, à ne pas nous replier sur nous-mêmes, ni à juger. Mais elles nous stimulent à rendre grâce pour tous les dons accordés aux autres, dons qui ne cessent de nous enrichir.

Lors de la première célébration une prière de « Mémoire et Action de grâce » l’a affirmé avec force, en soulignant que les Eglises ont besoin les unes des autres (voir annexe).

 

Textes de repentance

Toutefois nous avons senti qu’il y a eu et qu’il y a encore entre nous des frontières, des murs, des incompréhensions et des blessures. C’est pourquoi notre expérience de communion a été marquée dès ses débuts par un sens profond de repentance et de désir de pleine réconciliation avec le Seigneur et entre nous. Durant trois célébrations (de 2000 à 2002) nous avons pris un engagement « à nous laisser conduire par le Saint-Esprit… dans une attitude de repentance et d’humilité ».

C’est le premier texte liturgique sur lequel nous nous sommes mis d’accord (Voir en annexe). Ce sens de la repentance continue à nous accompagner pour que nous  cheminions vers une diversité vraiment réconciliée. Presqu’à chaque célébration œcuménique une confession des péchés est dite ensemble afin de nous le remettre en mémoire.

 

Le dialogue avec l’Eglise orthodoxe

Durant ces années, nous avons pu préparer des célébrations communes avec une grande diversité d’Eglises d’ici et d’ailleurs. Particulièrement marquantes ont été pour moi celles préparées avec des Eglises issues de la migration, où cette diversité n’est pas seulement confessionnelle mais aussi culturelle.

Quelques mots sur l’Eglise orthodoxe qui est particulièrement attentive au contenu de la foi et pour qui la prière interchrétienne ne va pas de soi. Pour cette Eglise le fondement de la foi apostolique est central. C’est le témoignage et le service qu’elle apporte dans le concert des Eglises.

C’est pourquoi lors d’une célébration œcuménique où l’Eglise orthodoxe participe le symbole de Nicée-Constantinople – et non le Symbole des Apôtres qu’elle ne reconnaît pas dans la liturgie – est dit ensemble par l’Assemblée, dans la version éditée par le Conseil œcuménique des Eglises (sans Filioque).

Pour les orthodoxes, chaque mot qu’on utilise a un sens. Ils nous le rappellent. Par exemple, lors d’une célébration, la prière à l’Esprit saint (« Roi du ciel… ») qui est au commencement de chaque office et liturgie a été modifiée en y ajoutant des réponds, ce qui a provoqué un malaise chez eux.

Un autre exemple : suite à la célébration avec le vitrail mobile de 25 pièces, nous avons eu quelques réactions, car ce vitrail donnait à certains l’impression que l’unité était déjà faite ! Ce qui n’est, bien sûr, pas le cas. C’était davantage un appel à la communion. Il faut donc être conscient de l’ambivalence des symboles.

Nous avons pu nous en expliquer lors de deux rencontres où nous avons décidé de poursuivre notre chemin ensemble. Avec la « Commission spéciale » de dialogue entre le Conseil œcuménique et l’Eglise orthodoxe, où ces questions ont été discutées, nous avons pu finalement dire : « Nous devons prier ensemble ». (In : De Harare à Porto Alegre, COE, Genève, 2006).

Les orthodoxes insistent surtout sur l’importance de la démarche pénitentielle : « Se mettre devant le Christ, devant la croix, dans une recherche de repentir est la seule voie possible. L’unité sera donnée par le Christ, par la conversion des cœurs. Sinon nous sommes dans l’illusion, sinon nous faisons l’impasse sur les choses essentielles », nous disait le Père Martin de Caflish, vicaire épiscopal de l’Eglise orthodoxe russe en Suisse.

 

Prier le Notre Père : une fraternité retrouvée

Dans son dernier livre sur le Notre Père (Vous donc priez ainsi, Bayard, Paris, 2011), le Groupe des Dombes, un groupe francophone de dialogue théologique entre protestants et catholiques, propose un itinéraire de conversion à partir de cette prière. Prier ensemble le même Père nous conduit à nous reconnaître frères et soeurs : « la proclamation d’une même paternité oblige les chrétiens à prendre conscience des exigences fraternelles qu’elle implique », écrit –il.

Prier le Notre Père ensemble est accepté par toutes les Eglises. Il est bon de l’introduire à chaque célébration œcuménique et c’est ce que nous avons vécu à Lausanne.

Une fraternité retrouvée, voici le grand acquis du pèlerinage œcuménique du siècle dernier. C’est ce que notait déjà le pape Jean-Paul II, il y a bientôt 20 ans dans son encyclique sur l’unité (Ut unum sint).

Nous sommes heureux d’apporter, à Lausanne, notre modeste pierre à la construction de cette fraternité retrouvée à travers ces célébrations de la Parole.

Les textes liturgiques créés pour ces célébrations se trouvent sur le site de la CECCV : http://ceccv.ch/liturgie-2/

Martin Hoegger 

Annexes : Textes liturgiques rédigés pour des célébrations oecuméniques

 

2. Texte d’engagement des Eglises

Nous confessons, selon les Ecritures:
«Il y a un seul Corps et un seul Esprit,
de même que votre vocation vous a appelés
à une seule espérance ;
un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême ;
un seul Dieu et Père de tous,
qui règne sur tous, agit par tous, et demeure en tous » (Ephésiens 4, 4-6).

Nous constatons que par nos égarements, nos faiblesses,
nos infidélités et nos étroitesses,
nous n’avons pas su garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix.

Eclairés et fortifiés par l’amour dont Dieu nous aime en Jésus-Christ,

nous désirons nous réconcilier pleinement avec le Seigneur

et avec nos frères et sœurs.

Nous prenons l’engagement

de nous laisser conduire par le Saint-Esprit afin que,
dans une attitude de repentance et d’humilité,
Il nous donne de reconnaître la richesse de nos diversités,
de surmonter nos divisions et de recevoir

le don de la pleine communion entre nos Eglises.

Pour la gloire de Dieu et la joie de Son peuple,
le rayonnement de l’Evangile et le service de toute la Création.

 

2. Mémoire et actions de grâce

 

Devant Dieu, nous faisons mémoire avec reconnaissance pour l’Eglise réformée.
Dieu Vivant, merci pour l’Eglise réformée !
Malgré sa prétention parfois, dans le passé, à se croire l’unique Eglise locale et malgré sa tentation parfois à s’accommoder trop facilement en son sein d’interprétations excessivement rationelles,
par ta grâce, et peut-être plus que dans toute autre Eglise,
tu as maintenu vivantes en elle une volonté d’étudier avec application la Bible et la préoccupation de respecter la liberté de conscience de chacun.
Merci pour ces innombrables réformés qui, à travers les siècles et jusqu’à ce jour, t’ont célébré avec fidélité et servi leurs prochains avec générosité.

Devant Dieu, nous faisons mémoire avec reconnaissance pour l’Eglise catholique.
Dieu Vivant, merci pour l’Eglise catholique !
Malgré sa prétention parfois, dans le passé, à se croire l’unique Eglise universelle et malgré sa tentation parfois à être oppressive par sa hiérarchie,
par ta grâce, et peut-être plus que dans toute autre Eglise,
tu as maintenu vivantes en elle une exigence d’ouverture à tous et la volonté de garder et de trouver une unité visible pour ton Eglise.
Merci pour ces innombrables catholiques qui, à travers les siècles et jusqu’à ce jour, t’ont célébré avec fidélité et servi leurs prochains avec générosité.

Devant Dieu, nous faisons mémoire avec reconnaissance pour
les Eglises évangéliques et pentecôtistes
.

Dieu Vivant, merci pour les Eglises évangéliques et pentecôtistes !
Malgré leurs prétentions parfois, dans certains lieux, à refuser l’oecuménisme et malgré leurs tentations parfois à créer sans consultation des communautés nouvelles,
par ta grâce, et peut-être plus que dans toute autre Eglise,
tu as maintenu vivantes en elles une exigence d’obéissance radicale à ta Parole et une recherche de vie communautaire fervente.

Merci pour ces innombrables évangéliques et pentecôtistes qui, depuis le siècle dernier et jusqu’à ce jour, t’ont célébré avec fidélité et servi leurs prochains avec générosité.

Devant Dieu, nous faisons mémoire avec reconnaissance pour
les Eglises orthodoxes
.

Dieu Vivant, merci pour les Eglises orthodoxes !
Malgré leur prétention parfois, dans certains pays, à se croire l’unique Eglise nationale et malgré leurs tentations parfois à refuser la modernité au nom de la tradition, par ta grâce, et peut-être plus que dans toute autre Eglise,
tu as maintenu vivantes en elles la beauté de la liturgie et le sens du mystère par leur célébration incessante de la Sainte Trinité et de la résurrection du Christ.
Merci pour ces innombrables orthodoxes qui, à travers les siècles et jusqu’à ce jour, t’ont célébré avec fidélité et servi leurs prochains avec générosité.

Devant Dieu, nous faisons mémoire avec reconnaissance pour
toutes les autres Eglises chrétiennes.

Dieu Vivant, merci entre autres pour les Eglises et communautés anglicanes, luthériennes, catholiques chrétiennes, adventistes, darbystes et pour toutes les communautés te célébrant en d’autres langues dans notre pays.
Malgré leurs prétentions parfois, dans le passé, à se croire chacune l’unique Eglise ou communauté fidèle et malgré la tentation parfois à se replier sur leur identité propre, par ta grâce, et en chacune d’elles, tu as maintenu vivantes des interpellations pour l’ensemble de l’Eglise vers plus de vérité, de fidélité et d’humilité.
Merci pour ces innombrables chrétiens qui, à travers les siècles et jusqu’à ce jour, t’ont célébré avec fidélité et servi leurs prochains avec générosité. 


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