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COMMUNION MONDIALE DES EGLISES REFORMEES : UNE ASSEMBLEE CONTRASTEE !

Née en 2010, de la fusion entre l’Alliance réformée mondiale et le Conseil œcuménique réformé, la Communion mondiale d’Églises réformées (CMER) a tenu sa deuxième assemblée générale à Leipzig, du 28 juin au 7 juillet 2017. Si les Eglises du Nord sont en chute libre, celles du sud sont en croissance.

Cette communion réunit 233 Eglises de plus de 100 pays. Au total, environ 80 millions de chrétiens. Première surprise : la moitié provient d’Asie et le tiers de l’Afrique. A sa fondation en 1875 l’Alliance n’était composée que d’Eglises d’Europe et d’Amérique du Nord. Aujourd’hui le point de gravité du protestantisme réformé s’est déplacé vers l’est et le sud. Comme celui des autres confessions chrétiennes !

Il est vrai que l’acceptation du Conseil chrétien de Chine comme membre associé fait exploser les statistiques. Il compterait seize millions de membres et continue à grandir. L’Indonésie avec 8,2 millions de réformés et l’Inde avec 6 millions viennent ensuite. Les trois pays où il y a le plus de réformés sont donc asiatiques. Zwingli et Calvin auraient-ils imaginés une telle diffusion mondiale de leur réforme ?

Alors qu’elles sont en croissance dans le « Global South », comme on le dit dans ce cercle, les Eglises réformées du Nord sont en chute libre. L’Amérique du Nord et l’Europe comptent grosso modo aujourd’hui douze millions de réformés. Je n’en croyais pas mes oreilles quand le président de la « United Church of Christ » (USA) me disait que son Eglise ne compte aujourd’hui plus qu’un million de membres. Deux fois moins qu’il y a dix ans !

Cette nouvelle donne a, évidemment, un immense impact sur la CMER dans les thèmes retenus, sa théologie et sa spiritualité. Les contextes que vivent beaucoup de pays sont marqués par la pauvreté, les déséquilibres sociaux, les restrictions de la liberté religieuse et les gouvernements autoritaires. Pour y répondre l’accent a été fortement mis sur la justice socio-économique. Sans oublier la « justice climatique ».

Participant pour la première fois à une telle assemblée, j’ai été surpris par l’emprise de ces thématiques, certes significatives pour les Eglises du sud, mais qui ne peuvent être reprises telles quelles par les Eglises du nord.

Diversité réconciliée. Vraiment ?

La source de l’engagement pour la justice est notre union au Christ. Lui seul est le lien d’unité dans la famille réformée, comme dans « l’oikoumènè ». Cela a été affirmé avec force lors de la signature d’une Déclaration commune avec l’Eglise catholique sur la justification par la foi, dans l’église de Wittenberg, où Martin Luther a exercé la majeure partie de son ministère.

LSignature WittenbertSignature de l’Accord sur la Justification. Wittenberg. 5 juillet 2017Désormais catholiques et réformés peuvent confesser d’une même voix que « c’est seulement par la grâce au moyen de la foi en l’action salvifique du Christ et non sur la base de notre mérite que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons l’Esprit saint qui renouvelle nos cœurs, nous habite et nous appelle à accomplir de bonnes œuvres ». La Fédération luthérienne et le Conseil méthodiste mondiaux qui avaient déjà signé cette déclaration se sont joints à cette cérémonie historique. Sans doute un des moments œcuméniques phare de toute cette année des 500 ans de la Réforme !

Si la communion avec les autres Eglises s’approfondit, les Eglises réformées sont néanmoins divisées entre elles : on en compte 27 en Indonésie, 11 aux USA, autant en Afrique du Sud. Et elles continuent de se diviser ! L’assemblée a en effet accueilli un nouveau membre né suite aux tensions provoquées par l’acceptation de la bénédiction des couples de même sexe dans la « Presbyterian Church (USA »).

Ce thème de la « sexualité humaine » a d’ailleurs été débattu dans pratiquement toutes les séances plénières et dans les « groupes de discernement ». Bien que le message final n’en parle pas, les tensions étaient fortes. Pour beaucoup de délégués la « communion » a été mise à mal. Sa diversité n’est pas vraiment réconciliée sur ce point !

La tension n’est pas seulement entre le Nord et le Sud, mais aussi entre les manières différentes de comprendre la conjugalité, l’autorité de la Bible et son interprétation.

Dernier constat suite aux nominations au Comité exécutif : si la CMER se dégage du Nord (7 élus sur 22), elle subit l’emprise de l’anglais (aucun francophone n’est membre du comité) et se féminise : la présidente, trois vice-présidentes et un vice-président forment le bureau.

Une des décisions les plus discutées de cette assemblée a d’ailleurs été une résolution appelant une quarantaine d’Eglises réfractaires à ouvrir l’ordination ministérielle aux femmes. De plus, la parité hommes-femmes sera désormais obligatoire dans tous les organes de la CMER. « Justice de genre » oblige !

 

Martin Hoegger 

Communion mondiale des Eglises réformées : une assemblée contrastée !


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